Travaux manuels domestiques et pratiques ordinaires de création : dépasser les différences de genre par l'expression artistique ?

Résumé Fr

Traditionnellement, les activités manuelles domestiques sont un espace où se construisent de fortes différences de genre : tandis que les femmes s'occupent à des ouvrages de dames - l'expression même étant révélatrice de cette différenciation -, les hommes adoptent des pratiques relevant du bricolage. L'apprentissage scolaire des travaux manuels reproduit et conditionne d'ailleurs cette répartition sexuée des usages créatifs ordinaires. Les jeunes filles sont initiées aux travaux d'aiguille pour les préparer à leurs futures charges domestiques ; on enseigne aux garçons à se servir des outils courants afin qu'ils se familiarisent avec les métiers manuels et qu'ils acquièrent une dextérité suffisante pour effectuer des travaux d'entretien et de réparation ordinaires. Toutefois, le développement des loisirs créatifs au cours de la seconde moitié du XIXe siècle tend à contrarier cette distinction. D'une part un grand nombre d'activités manuelles enfantines de création sont asexuées ; d'autre part, parce qu'il s'agit de fabriquer de ses mains, d'adopter une occupation créative à vocation expressive, la pratique de travaux artistiques ou artisanaux pourrait ne pas être si différenciée. Les hommes comme les femmes étaient susceptibles de réaliser des poteries, des cadres, des reliures et autres objets usuels et décoratifs visant à faire montre de capacités créatives et à exprimer son individualité, dépassant de la sorte la partition traditionnelle des usages de création domestique.