Eléonore Hamaide-Jager, « Dessine-moi un mouton... à cinq pattes : de l’art de la critique journalistique de s’emparer de l’Oulipo », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.i2ymi8
Si l’influence d’un auteur se lit au nombre de citations dans un journal, l’Oulipo est alors ancré dans le paysage culturel français. Cette affirmation générale cache pourtant une réalité plus subtile. Par l’analyse des critiques littéraires et des articles parus dans la magazine hebdomadaire Télérama, cet article souligne combien existe une forme de frottement entre le groupe Oulipo et ses membres. Les pages « livres » offrent une tribune aux ouvrages collectifs tout en mettant pourtant en avant le nom d’auteurs reconnus comme Queneau et surtout Perec, dont l’importance dans l’ouvroir ne se dément pas malgré sa mort, ou Roubaud. Certains ouvrages individuels (Le Tellier, Fournel, Jouet) sont chroniqués mais les références les plus nombreuses concernent les performances des oulipiens lors de lectures publiques ou d’ateliers d’écriture, valorisant, plutôt que leurs livres, leur verve comique et leur capacité à jouer des mots. L’Oulipo apparaît finalement comme un réservoir de contraintes que des ouvroirs fictifs ou réels, en bande dessinée, en radio ou en peinture ont investi dans leurs créations. Ces dernières années, la référence au groupe devient quasiment une expression lexicalisée synonyme de contrainte ou d’exercice impossible, même si alors, la concurrence avec Perec, oulipien par excellence, rejaillit.