D'une mosaïque verte à une trame bleue? Penser les potentialités et les ressources des vallées fossiles du Sine à Diourbel (Sénégal).

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13 décembre 2023

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Bertrand Sajaloli et al., « D'une mosaïque verte à une trame bleue? Penser les potentialités et les ressources des vallées fossiles du Sine à Diourbel (Sénégal). », HAL-SHS : géographie, ID : 10670/1.iheddq


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Les vallées urbaines sont fréquemment appréhendées comme des corridors verts et bleus et sont au cœur des enjeux socio-spatiaux contemporains des villes. Elles accueillent une diversité d’usages - agriculture urbaine, loisirs … - liée aux ressources qu’elles abritent et qui sont mobilisées par les populations dans un but économique, culturel ou de bien-être. Avec le changement climatique, elles sont aussi perçues comme un moyen d’en atténuer les effets par le maintien ou la restauration des services écosystémiques des milieux humides de fond de vallée. Elles sont ainsi au cœur de la fabrique de l’espace urbain, qu’elle soit planifiée ou non, et constituent des laboratoires de l’intégration urbaine de la nature (eau, végétation) en ville dans un contexte de mise « en réseau » dans ces corridors verts et bleus. L’outil d’aménagement « Trame verte et bleue », mis en place en France en 2010, a institutionnalisé cette approche. De nombreux travaux de recherche ont étudié l’outil, sa territorialisation (Vanpeene-Bruhier S., Amsallem J., 2014 ; Francois, Amsallem, Deshayes, 2014 ; Cormier, 2011), les conflits qui ont pu surgir lors de sa mise en œuvre comme par exemple lors de la restauration des continuités écologiques (eg. Le Calvez, Hellier, 2017), ou encore son application en dehors de son contexte de naissance. C’est par exemple le cas de Robineau et al (2014) dont les travaux questionnent l’application au Burkina Faso d’un modèle européen « d’espace public de préservation de la nature » dans un contexte où les actions spontanées prennent le pas sur la planification et où l’espace non bâti est appréhendé comme un espace libre. S’éloignant d’une approche de la Trame verte et bleue par la planification, cette communication n’aborde pas les trames vertes et bleus sous l’angle qui en analyse les effets, les modes d’appropriation, une fois celles-ci mise en œuvre dans la planification urbaine. Elle propose plutôt d’interroger les prémices d’une appréhension de vallées urbaines comme des trames vertes et bleues. En effet, un des éléments de compréhension clef réside dans la/les façon(s) dont ces outils d’aménagement durable au service de la protection de la biodiversité émergent. Quels sont les processus, les mécanismes qui conduisent à penser la Trame verte et bleue comme un outil adéquat de préservation ? Pour faire face à quels enjeux ? En prenant appui sur les vallées urbaines fossiles du Sine et Car-Car de la ville de Diourbel au Sénégal, il s’agit de montrer comment la variabilité climatique de la région articulée avec l’évolution des usages des vallées ont suscité des vulnérabilités nouvelles qui bousculent les perceptions qu’ont les acteurs institutionnels et les habitants des deux vallées, et tendent à les appréhender comme des corridors vert et bleu, des communs à préserver et valoriser. Une spécificité de l’étude de cas réside dans l’absence de formulation institutionnelle ou publique d’une planification de type « Trame verte et bleue » à ce jour à Diourbel, et ce même si les projets urbains évoquent la continuité hydrologique de la vallée. Seront ainsi éclairés les processus socio-spatiaux actuels suscitant une réflexion résolument proche des principes de la trame verte et bleue. Jadis corridors verts et bleus traversant la ville de Diourbel (Sénégal), les vallées fossiles urbaines du Sine et du Car-Car sont marquées depuis une cinquantaine d’années par des changements socio-environnementaux qui ont redessiné les modes d’appropriation de ces vallées, leurs paysages, et le rôle qu’elles occupaient dans le développement économique de Diourbel et dans son rayonnement. La sécheresse des années 1970-1980 a entraîné un déclin et une réorganisation spatiale du maraîchage dans les deux vallées qui étaient jusqu’alors inscrites dans une vaste ceinture maraichère autour de Diourbel. L’urbanisation des vallées qui s’en est suivie, ainsi que l’exploitation du sable, ont également modifié les modes d’appropriation et ont créé de nouvelles centralités dans les vallées associées à des espaces relégués où les décharges se sont multipliées. Une des conséquences a été la fragmentation de ces deux vallées fossiles en quatre secteurs, faisant l’effet d’îlots verts et bleus aux modes de valorisation distincts, et à leur « rétrécissement » jusqu’à parfois disparaître du paysage urbain (Le Calvez et alii, 2023). Ces processus, qu’il s’agit de reconstituer, et ces reconfigurations spatiales sont aujourd’hui le terreau de nouvelles vulnérabilités qui ont émergé avec le retour des pluies à Diourbel, expression de la variabilité climatique que connaît le Sénégal. Les quartiers situés dans les bas-fonds qui n’avaient pas été en eau depuis les années 1970 sont particulièrement vulnérables : ils sont régulièrement inondés ce qui entraîne des risques pour les riverains. Les réseaux urbains d’assainissement et d’eaux pluviales ne sont pas capables d’absorber les débits ou sont dysfonctionnels faute d’exutoires aux points bas. Plus globalement, l’accès aux ressources de la vallée (eau et sol) nécessaires aux activités de maraîchage qui avaient fait la renommée historique de la ville est rendu difficile aussi bien sur les volets quantitatifs que qualitatifs. Si Diourbel renoue ainsi avec une présence plus abondante de l’eau dans les vallées du Sine et du Car-Car, cette présence est néanmoins différemment perçue et vécue. Elles sont sources de risques pour les populations (sanitaires, environnementales, économiques…) dans certains secteurs, tandis que dans d’autres elles apparaissent comme des opportunités de développement. Ainsi, afin d’enrayer les dégradations de la vallée et pour maintenir les activités dont dépendent une partie de la population, des projets se structurent. Dans la partie sud de la vallée, un projet de restauration écologique est en cours de réflexion, centré sur une valorisation écologique et économique des Kambe Suuf, ces zones humides issues de l’extraction de sable. Dans un autre secteur, dans la vallée du Car-Car, une expérimentation privée a elle créé un espace de loisirs intra-urbain en bord de zone humide.Devenus aujourd’hui une mosaïque de tâches vertes et bleues tels des îlots, penser et intégrer ces espaces dans les documents de planification pourraient contribuer à une meilleure prise en compte des enjeux de nature en ville dans un contexte de pression urbaine et les problématiques foncières qui en découlent. Les potentialités en termes ressources et des services écosystémiques y sont nombreux, tout comme les contraintes (contraintes climatiques, inondation, salinité…) d’où la nécessité d’une gouvernance multi-acteurs mobilisant les citoyens, politiques, scientifiques, gestionnaires pour faire face aux multiples défis que posent les changements climatiques, l’accroissement démographique ou encore la pression urbaine. Il s’agit ainsi de suivre la prise de conscience récente par les édiles de Diourbel de la nécessité de penser les vallées du sine et du Car Car dans leur intégralité et d’envisager les bienfaits que l’on pourrait en attendre.

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