L’humanisme des contes. Les cas de Mme de Villeneuve et Mme Leprince de Beaumont

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14 juin 2019

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Nicolas Brucker, « L’humanisme des contes. Les cas de Mme de Villeneuve et Mme Leprince de Beaumont », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.ijazt2


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Dans l’univers du conte, le héros peut subir d’étonnantes métamorphoses : le roi Merveilleux, pour avoir excité la jalousie du génie Brutalaf, devient un joli petit chien (Mme de Villeneuve, Papa-Joli) ; Brillantin est transformé en singe et Galant en loup (id., Mirliton) ; le prince Chéri est changé par la fée Candide en monstre, avant de reprendre sa forme humaine en passant par les stades successifs du chien et du pigeon (Mme de Beaumont, Prince Chéri) ; le prince de La Belle et la Bête prend l’apparence d’un monstre hideux. La présence de l’animal, aux frontières de l’humanité, pose la question de ce qui fonde la dignité de l’homme. Si l’on s’en tient à la morale des contes, l’humanisme qui s’y manifeste peut être perçu comme l’expression d’une perfection morale qu’a irréversiblement endommagée le péché originel. L’homme essentiel se situe dans un avant de l’histoire, ce que le conte signifie par un processus de métamorphose qui est en même temps dégradation de la beauté première. La reconquête de la vertu et du bonheur, au prix d’un long itinéraire, semé d’obstacles, rendra au visage son humanité première. A cette lecture morale, guidée par une axiologie chrétienne (de Thomas d’Aquin à Emmanuel Mounier), se superpose une seconde lecture, qui relève quant à elle de la tradition littéraire du conte et qui met en œuvre l’imagination en tant que faculté propre à démultiplier l’existence. Cet autre humanisme (de Montaigne à Lévi-Strauss) définit la dignité de l’homme non dans sa faculté à rejoindre son principe, mais dans son aptitude à explorer des formes de vie diverses, à se changer, à se travestir. La fiction, particulièrement dans le registre du merveilleux, réalise cette sortie de soi, condition de la rencontre de l’autre. L’animal figure l’altérité (morale, psychique, culturelle) ; il donne une existence à des catégories humaines (le noir, le pauvre, le domestique) tenues à distance. Le héros retrouve un visage d’homme par l’empathie qu’il montre envers ses semblables : il doit sa transformation à l’extension du critère d’humanité. Reste que ces deux formes d’humanisme (l’un fixiste, l’autre évolutif) cohabitent dans les mêmes œuvres : d’où la tension, qui peut aller jusqu’à la contradiction, entre l’instruction morale qui doit se dégager de la lecture du conte, et l’expérience de lecture que permet la fiction, deux rapports au texte bien différents.

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