12 septembre 2019
Martine Kaluszynski, « D’une action philanthropique à la construction d’une pensée (politique) réformatrice : le rôle de l’internationalisation (instruments, discours, réseaux d’acteurs) dans le domaine pénitentiaire et pénal », HAL-SHS : sciences politiques, ID : 10670/1.irob81
L’histoire des pénalités a été souvent, traditionnellement, une histoire de la circulation internationale et de la réception des idées et des innovations dans le domaine de la prise en charge des criminels.Depuis le XIXe siècle, le champ pénal s’est construit à partir, à travers la circulation internationale et par le prisme d’espaces, de structures, de groupes qui ont pu ainsi ramener et proposer à leurs contrées-mères, des modèles glanés ici ou là. Ce qu’on a pu appeler le tourisme pénitentiaire Il s'agit de revenir sur le rôle de la philanthropie dans l'élaboration d’une pensée (politique) réformatrice dans le domaine pénitentiaire ou pénal. et des différents instruments (discours, réseaux d’acteurs, instances nationales et surtout internationales qui ont construit ce champ Les expositions pénitentiaires, dont la première se tint lors de l’exposition universelle, permettront de montrer au public l’état du système pénitentiaire, voire même de la réforme pénitentiaire, l’Institut de droit international ou l’Union internationale de droit pénal fondée par Von Liszt, Prins, Van Hamel en 1890. Les congrès internationaux pénitentiaires(1872-1950) jouent également ce rôle de diffusion et d’échanges. Après la Seconde Guerre Mondiale, un mouvement d’idées apparaît dominant : la Défense sociale nouvelle, portée par entre autres la Société internationale de Défense sociale et incarnée par des hommes comme Marc Ancel, Paul Cornil, absolument omniprésents sur la scène internationale et européenne. ou plus tard la création du Comité européen pour les problèmes criminels au sein du Conseil de l’Europe. La pensée politique réformatrice et son action n’ont cessé de prospérer depuis le XIXéme siècle, période qui voit se structurer sur le plan national et le plan international, des espaces de diffusion et de circulation des idées et des dispositifs, élaborant ainsi une sorte d’internationale pénale qui transcendera autant que possible les clivages nationaux, politiques, diplomatiques. Le modèle est si bien construit que le XXéme siècle s’alignera, sans beaucoup de modifications sur cette configuration, introduisant simplement une évolution sémantique : de la réforme pénitentiaire aux bonnes pratiques. La question de la réforme pénitentiaire ou pénale universalise les participations de pays de culture distincte, réunis et unis vers un même objectif, Les vertus de cette internationalisation réussie sont sans doute liées à l’objet même, une question sociopolitique qui traverse les chronologies et les géographies et s’ancre au cœur des démocraties.