2008
Cairn
Karl Wilhelm Merks, « Morale et religion : Pistes de recherche », Revue d'éthique et de théologie morale, ID : 10670/1.j0kzne
Faisant le constat d’une analyse commune croyants/non-croyants de la relation entre morale et religion, l’auteur conteste la lecture faite par Veritas Splendor des développements récents de la théologie morale. Il cherche à proposer une troisième voie entre la critique laïciste, d’une part, et le blocage de toute réforme, d’autre part.Pour commencer, il est nécessaire de reconnaître le savoir séculier comme un véritable lieu théologique. Cela oblige à repenser l’articulation entre les sources de la théologie morale : Écriture, Magistère et raison naturelle. L’auteur rappelle la pauvreté de l’usage de la Bible dans la structuration habituelle de l’éthique catholique et se demande de quelle manière y remédier. Les exégètes sont également perplexes. L’argument de nature a été, au contraire, fortement valorisé, mais dans une orientation qui devait la déconnecter de l’expérience. Quant au Magistère, il serait important de réfléchir sur sa qualification pour traiter du locus étranger de la raison naturelle. Ces insuffisances ont contribué à mettre au premier plan la notion de personne dans la théologie morale récente.Merks propose de lire à nouveaux frais Thomas d’Aquin, car chaque personne est concernée par l’interprétation de ce qui est bien pour elle, ce qui ne met donc pas un terme à la nécessité d’une morale objective Nous assumons donc le passage d’une morale cosmocentrique à une morale anthropocentrique, où la liberté responsable devient la notion clé et où la culture aide à exprimer de nouveau la dimension communautaire de la morale.Sur cette base, il s’agit de repenser le lien transcendance/immanence dans la société actuelle, compte tenu du rôle que les religions peuvent y jouer. L’historicité du développement de la liberté responsable du sujet humain montre que le modèle de la morale autonome correspond bien à la tradition. C’est sur ce terrain que s’incarne la spécificité de l’éthique chrétienne. Il n’est pas possible de s’appuyer sur Thomas d’Aquin pour opérer une séparation tranchée entre éthique humaine raisonnable et éthique de la foi, et ainsi renforcer l’autorité de la Bible ou celle du Magistère. La conception autonome de la foi n’interdit nullement de mettre l’inspiration chrétienne au service des sociétés modernes.