Le recours à une « subsidiarité positive »

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2023

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Hélène Hurpy, « Le recours à une « subsidiarité positive » », Civitas Europa, ID : 10670/1.j44m6x


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Le principe de subsidiarité cristallise actuellement l’enjeu de la survie du système conventionnel dans un contexte de défiance à l’égard de la Cour européenne des droits de l’Homme. Le volet négatif de la subsidiarité se concrétiserait par la modification récente du Préambule de la Convention européenne des droits de l’Homme – via le Protocole d’amendement n° 15 – qui juxtapose expressément « principe de subsidiarité » et « marge d’appréciation » laissée aux États, reflétant ainsi le self-restraint de la Cour européenne à l’égard de l’autonomie des autorités étatiques. Le recours à la subsidiarité positive tendrait à renforcer l’intervention de chaque acteur du système conventionnel en insistant sur leur responsabilité partagée dans la garantie effective du texte de 1950, comme l’illustre le Protocole additionnel n° 16, qui met en place une procédure d’avis consultatif et substitue une logique de dialogue et de confiance à une logique contentieuse et conflictuelle entre juridictions nationales et européenne. Cette approche de la subsidiarité permet alors de repenser la légitimité de l’intervention du pouvoir en l’orientant vers l’effectivité des droits qui concourt aussi à la pleine réalisation de la dignité dont l’universalisme irrigue le système conventionnel. En effet, si la subsidiarité s’entend comme un principe de répartition complémentaire des rôles entre les échelons national et supranational, elle atteste de ce que les rôles des acteurs conventionnels ne sont pas interchangeables et se légitiment à l’aune du principe d’effectivité : les autorités nationales sont mieux placées pour protéger de manière concrète et effective les droits conventionnels compte tenu des caractéristiques propres de leur ordre juridique et de leurs traditions ; la Cour assure, quant-à-elle, la sauvegarde mais aussi le développement de la Convention dans le but de réaliser une union plus étroite entre les membres du Conseil de l’Europe : en somme, l’unité dans la diversité certes, mais par l’harmonisation et non par l’uniformisation ! Dans cette optique, le recours à la subsidiarité positive atteste d’abord du déploiement de l’effectivité des droits par la responsabilité partagée des acteurs conventionnels. Il revient aux acteurs nationaux de se réapproprier leur responsabilité primaire dans la mise en œuvre complète de la Convention et notamment aux juges nationaux de faire vivre positivement la Convention. La redéfinition de la mission de supervision de la Cour européenne renforce aussi sa responsabilisation dans la préservation des diversités nationales par la modification de l’intensité de son contrôle. Le recours à la subsidiarité positive contribue ainsi à ériger le principe de responsabilité partagée au rang d’outil indispensable à l’effectivité des droits, renforçant la légitimité de chaque acteur conventionnel. Ce recours tend alors à conforter la Cour de Strasbourg dans sa fonction d’intégration visant l’harmonisation des droits nationaux et le déploiement constitutionnel de la Convention européenne. Le recours à la subsidiarité positive s’inscrit ensuite dans la conquête d’un ordre objectif de valeurs inhérent à la Convention européenne afin de garantir l’universalisme des droits de l’Homme. La subsidiarité positive renforce ici la fonction intégratrice de la Cour afin d’accroître l’effet utile de la Convention qui constitue un instrument de protection généralisée des droits des personnes en Europe, mais aussi un espace de bonheur au sein duquel ces droits peuvent se déployer compte tenu des valeurs inhérentes aux sociétés démocratiques européennes. L’enjeu de la survivance du système conventionnel par la subsidiarité implique donc une responsabilisation des acteurs conventionnels dans l’effectivité des droits, mais plus encore celle de la Cour européenne qui détient la responsabilité immense de rappeler la valeur transcendantale de la Convention européenne fondée sur l’universalisme de la dignité humaine.

The principle of subsidiarity currently crystallises the topic of survival of the conventional system in a context marked by mistrust with regard to the European Court of Human Rights. The negative aspect of subsidiarity has materialised in the recent change to the Preamble of the European Convention on Human Rights - via Amendment Protocol no. 15 - which expressly superimposes the “principle of subsidiarity” and the “margin of appreciation” left to Member States, thereby reflecting the European Court’s self-restraint with regard to the autonomy of national authorities. Recourse to positive subsidiarity tends to improve the intervention of each actor involved in the conventional system by insisting on their shared responsibility of effectively safeguarding the 1950 text. This is illustrated by Additional Protocol no. 16 which introduces an advisory opinion procedure and replaces the contentious and conflictual approach to the relationship between national and European Union jurisdictions with a dialogue- and trust-based approach. This approach to subsidiarity provides another perspective on the legitimacy of the authority’s intervention by guiding its efforts towards ensuring the effectiveness of rights, which also contributes towards achieving dignity, the universalism of which permeates the conventional system. In fact, while subsidiarity is considered a principle allowing for a complementary division of roles between the national and supranational levels, it also attests to the fact that the roles played by conventional actors are not interchangeable and are legitimised by the principle of effectiveness: national authorities are better placed to concretely and effectively protect conventional rights given the inherent characteristics of their legal system and traditions; meanwhile, the Court is responsible for safeguarding and developing the Convention with a view to ensuring a closer union between Council of Europe members. In sum, unity in diversity indeed, but achieved through harmonisation and not uniformisation! From this perspective, recourse to positive subsidiarity attests firstly to the implementation of the effectiveness of rights through the shared responsibility of conventional actors. It is up to national actors to reappropriate their primary responsibility of fully implementing the Convention, and it is notably up to national judges to breathe positive life into the Convention. The redefining of the European Court’s duty of supervision also increases its responsibility of preserving national diversity by adjusting the intensity of its oversight. Thus, recourse to positive subsidiarity contributes towards positioning the principle of shared responsibility as a vital tool to ensure the effectiveness of rights, thereby reinforcing the legitimacy of each conventional actor. This recourse tends to consolidate the Court of Strasbourg’s integrative function which aims to harmonise national laws and ensure the constitutional implementation of the European Convention. Positive subsidiarity is also resorted to in an effort to build an objective system of values inherent to the European Convention, with a view to safeguarding the universalism of human rights. In this case, positive subsidiarity strengthens the Court’s integrative function in order to increase the Convention’s useful effect as an instrument for the general protection of individual rights in Europe as well as a happy place in which these rights can be deployed in light of the inherent values upheld by democratic European societies. Thus, the challenge of ensuring the conventional system’s survival through subsidiarity implies the empowerment of conventional actors as regards the effectiveness of rights, but more so that of the European Court which bears the great responsibility of reaffirming the transcendental value of the European Convention based on the universalism of human dignity.

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