2007
Cairn
Karl-Leo Schwering, « Techniques chirurgicales et techniques magiques », Cliniques méditerranéennes, ID : 10670/1.j7b5ex
Les représentants du corps médical ont recours aux techniques chirurgicales pour résoudre le problème de la mort – en particulier en transplantation d’organes –, alors que les patients éprouvent malgré eux les effets de la pensée magique. Deux systèmes de pensée sont ainsi amenés à se côtoyer, voire à s’opposer : le système de pensée scientifique pour les uns, le système de pensée animiste pour les autres. Une dissymétrie fondamentale est cependant à remarquer si l’on se réfère à l’analyse proposée par Freud dans Totem et tabou : en effet, dans le deuxième cas nous n’assistons pas au développement d’un système complet, ce dont témoigne l’absence de techniques magiques chez les patients. Mais cette absence s’explique précisément du fait de l’omniprésence des premières, dont l’efficacité et le haut degré de rationalité conduit à méconnaître leur niveau motivationnel inconscient : celui d’un refus de la mort, qui s’apparente en même temps au fait de la donner. Or c’est précisément l’intuition de cette face cachée de la rationalité médicale – qui en fait une nécessaire « pratique des seuils de la transgression » – dont témoigne la pensée magique des patients. Cette pensée est même à considérer comme le « retour du refoulé » médical, puisque s’y actualisent, sur le mode conscient empreint de culpabilité, divers fantasmes, dont celui d’un désir de mort à l’endroit du donneur.