L’Amazonie brésilienne, marge et frontière

Résumé Fr

Du fait de sa position par rapport au cœur économique et démographique du Brésil et de par son histoire de territoire difficile d’accès, l’Amazonie s’inscrit facilement dans les théories géographiques qui définissent les marges ou les périphéries. On peut ainsi la situer sans peine dans le modèle centre/périphérie (comme périphérie, évidemment), tout en prenant soin d’observer que ce modèle se répète à plusieurs échelles à l’intérieur de la région : Manaus et Belém sont à leur tour centres par rapport à des périphéries plus lointaines, que l’on peut qualifier d’ultrapériphéries du Brésil en utilisant le vocabulaire technocratique de l’Union européenne. Cependant, comme le rappelle Bailly (1995), la marginalité recoupe une situation géographique (un éloignement spatial du centre) mais aussi sociale. De ce point de vue, l’Amazonie a changé depuis les années 1960. Si l’on peut sans doute considérer que l’ensemble de ton territoire et de sa société étaient marginaux dans le Brésil colonial ou impérial, et jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les politiques d’intégration ont malgré tout rempli en partie leur objectif en renforçant considérablement les liens entre l’Amazonie contemporaine et le reste du Brésil. Elle n’est donc plus désormais marginale en elle-même, mais elle comprend encore une grande partie de marges, dont cet article va s’efforcer de traiter.L’approche que nous proposons ici va insister sur deux caractéristiques, à savoir le fait qu’une grande partie de l’Amazonie est peuplée par une population peu nombreuse et dispersée, et le fait qu’elle demeure encore pour une partie substantielle de son territoire éloignée et isolée des centres économiques et politiques du Brésil. Ces caractéristiques et les conséquences qu’elles entraînent (difficulté ou absence de contrôle de l’État, difficulté de transport, méconnaissance mais aussi exotisme, etc.) permettent de rapprocher l’Amazonie d’autres régions peu peuplées du monde que l’on peut désigner par le néologisme de « marges géo-démographiques ».