2023
Cairn
François Jullien, « Dans quelle langue pense le droit ? : Propos tenus en l'honneur de Madame Chantal Arens, première présidente de la Cour de cassation, 6 juillet 2022 », Les Cahiers de la Justice, ID : 10670/1.jx9ls1
Le droit se pense dans notre culture dans la langue de l'Être, c'est-à-dire, comme porteur d'une vérité détachée des circonstances. La conception chinoise, au contraire, loin de se référer à l'Être, voit le droit du côté de « l'évasif ». Le tao lui-même est dit « flou », « vague », « indistinct ». Mais n'est-ce pas ce que nous appelons le droit « souple » quand la « régulation » s'oppose à la règle ? En sorte que ce dialogue des cultures peut « décoïncider » de notre approche ontologique du droit en nous montrant qu'il est moins figé dans son essence que proche d'un mouvement permanent destiné « non pas à être mais à s'actualiser ».