2018
Cairn
Olivier Favereau, « Valeur(s), exploitation et économie des conventions », Cahiers d'économie Politique, ID : 10670/1.k4hyie
Le programme conventionnaliste entend déplacer les conventions du langage théorique en économie vers une réimbrication des dimensions « coordination » et « reproduction », tout en autorisant une interpénétration des deux autres dimensions « valeurs » et « rationalité ». Cela a conduit Boltanski et Chiapello (1999) à considérer l’exploitation et la justification comme l’inverse l’une de l’autre. Un lien direct avec Marx devient possible. Marx fait toutefois apparaître l’exploitation non dans l’espace des prix mais dans un espace des valeurs, objectivement mesurables (en heures de travail abstrait), alors que l’économie des conventions opère avec un espace des valeurs, au sens commun, normatif, du terme, mobilisant des entités intersubjectives (telle la justice). Le grand projet marxien d’intelligibilité du capitalisme à partir de la mise à nu de l’injustice capital/travail n’est pas prisonnier de la théorie de la valeur-travail. La distinction conventionnaliste de l’entreprise et de la société, dissimulée dans le « Régime d’Intersubjectivité et de Normativité » néolibéral, permet de faire apparaître dans le nouvel espace des valeurs, un usage indu du droit de propriété par les actionnaires de la société, qui s’approprient, au-delà des revenus de facteurs, le revenu proprement collectif de l’organisation qu’est l’entreprise. Cette forme d’exploitation, objectivement mesurable, entrevue par Proudhon dès 1840, ne peut être remise en cause sans la généralisation de la codétermination, dans le gouvernement des entreprises. Codes JEL : A1, B14, B51, B52, D23, G3, K2, L22