2021
Cairn
Angela Davis et al., « Les blueswomen contre le patriarcat », Audimat, ID : 10670/1.k6wsd2
Angela Davis, militante communiste africaine-américaine et membre du Black Panther Party, est aujourd’hui professeure de philosophie à l’université de Santa Cruz. Nous sommes reconnaissants aux éditions Libertalia et à son traducteur Julien Bordier de nous autoriser à publier un extrait de son livre majeur bientôt republié en poche, Blues et féminisme noir, paru pour la première fois en anglais en 1999. Ce livre est passionnant à plus d’un titre, notamment comme positionnement vis-à-vis de la manière dont les intellectuels interprètent le blues et les musiques qui en sont issues — en séparant souvent le sens des paroles du style de chant, ou en y lisant à tort le reflet direct, sans élaboration, de l’expérience noire. Mais ce qui nous a intéressés dans l’extrait de chapitre que nous reproduisons dans ce numéro, c’est la façon dont il reprend le fil d’une conversation qui court à travers nos précédentes publications d’articles de Mark Fisher et Ellen Willis, et dans une moindre mesure les allusions de Wayne Marshall, dans ce numéro, à la réception des références au sexe dans le reggaeton. L’enjeu de cette discussion, c’est de savoir comment les chansons indexent, à la fois explicitement et indirectement, ce qu’il advient des relations hommes-femmes, du sentiment amoureux et des institutions comme le mariage quand ils se construisent sous les conditions du capitalisme (à travers la dépendance directe ou indirecte au travail salarié), du patriarcat (notamment les différents types de violence faites aux femmes) et de l’héritage de l’esclavage (entendu comme une histoire d’exploitation, de coercition et de violence que l’abolition n’a pas annulée). Plus précisément, ce texte propose d’écouter autrement des chansons qui sont souvent perçues comme incarnant un discours de soumission ou (à l’inverse) comme obscènes. Cette histoire peut ainsi éclairer, à près d’un siècle d’écart, un morceau (et un clip) comme « WAP » de Cardi B & Megan Thee Stallion, ainsi que les multiples réactions qu’il a suscitées.