The metalsmith artist, or the alchemist’s rebirth. L'artiste métallurgiste, ou la renaissance de l'alchimiste. En Fr

Résumé Fr

Le rêve de l’Homme « comme maître et possesseur de la nature », selon les termes de René Descartes (Discours de la méthode, 1937), est un rêve atemporel. A l’aide des connaissances et des technologies accumulées au fil des siècles, l’humanité cherche à comprendre toujours plus en profondeur l’univers qui l’entoure, du plus microscopique des organismes aux systèmes stellaires les plus gigantesques. Parmi les multiples sciences qui sont nées de cette curiosité infinie, il en est une qui demeure, encore aujourd’hui, des plus mystérieuses et des plus oniriques : l’alchimie. Longtemps présentée comme la mère de la chimie telle que nous la connaissons, cette science occulte plonge ses racines jusque dans l’Antiquité grecque, où elle a notamment été théorisée par des penseurs comme Aristote ou Platon. « Collaborer avec la Nature, l’aider à produire dans un temps de plus en plus rapide, changer les modalités de la matière », telles sont les sources de l'idéologie alchimique, ici résumées par Mircea Eliade dans son ouvrage Forgerons et alchimistes (1950).Bien que les expérimentations alchimiques n’aient jamais produit que d’interminables songeries, faute de parvenir à accomplir les prouesses scientifiques auxquelles elles aspiraient, elles sont aujourd’hui solidement ancrées dans l’imaginaire populaire. Comme beaucoup de rêveries collectives, l’onirisme de la doctrine des alchimistes est perceptible au sein de nombreuses productions culturelles : il se retrouve par exemple dans le cinéma, la littérature ou les jeux-vidéos, mais aussi dans les arts plastiques, et notamment dans la sculpture métallique, principal médium étudié dans cette communication. Articulé autour de l’analyse de deux œuvres spécifiques du sculpteur Richard Serra, que sont Gutter Corner Splash : Night Shift (1969-1995) et Slat (1983), cet examen de l’influence des questionnements scientifiques sur la création plastique s’intéressera tout particulièrement au rapport qu’entretiennent les artistes métallurgistes contemporains avec les réminiscences de cette science millénaire qu’est l’alchimie. Tout au long du développement de cette communication, le parallèle sera aussi effectué avec la science des matériaux de notre époque, très largement étudiée et exploitée par les sculpteurs du métal : en effet, comme nous le verrons, l’utilisation artistique de certains nouveaux matériaux se révèle être la parfaite illustration de ce que pourrait être le parachèvement de l’une des grandes œuvres inabouties des alchimistes : le contrôle de la matière via la transmutation des métaux.