2019
Cairn
Pascal Caille, « L’apport des parties à la qualité de l’instruction », Civitas Europa, ID : 10670/1.kavamv
Sans être radicalement ignorée de la jurisprudence administrative, la qualité de l’instruction n’est pas une question essentielle pour elle. L’enjeu est pourtant double. Il en va pourtant, en premier lieu, de la durée raisonnable de jugement, en second lieu, du fond, en ce que l’instruction conditionne l’issue du litige et concourt à la qualité de la décision juridictionnelle. En effet, d’une part, par leur aptitude à les placer dans les meilleures conditions pour se faire comprendre du juge et d’éviter notamment qu’il se méprenne sur le sens des conclusions et la portée des moyens, les écritures des parties sont un vecteur de correcte appréhension de leur argumentation ; d’autre part, par leur complétude et leur cohérence, et donc leur pertinence, les écritures deviennent un vecteur du correct déroulement de la contradiction. Dans ces conditions, il est permis de dire que les parties exercent une influence sur l’intelligibilité de l’instruction. Mais les parties exercent également une influence sur la sincérité de l’instruction. Sans qu’il ne soit l’objet, dans la présente étude, de s’interroger sur l’intérêt qu’il y aurait à consacrer formellement le principe de loyauté dans le procès administratif, aujourd’hui réclamé par une part importante de la doctrine, il convient d’admettre qu’un comportement loyal des parties revêt un intérêt certain pour la qualité de l’instruction. En effet, dès lors qu’il ne saurait tout régler, les parties ne pouvant utilement combattre toutes les manœuvres adverses, le principe du contradictoire est impuissant à surmonter à lui-seul tous les obstacles. En intervenant au soutien de la contradiction, la loyauté des parties concourt ainsi à la qualité de l’instruction. Par ailleurs, en dépit de l’affirmation bien connue suivant laquelle la procédure administrative juridictionnelle est inquisitoriale, l’action du juge reste trop souvent limitée pour qu’émerge, par sa simple intervention, la « vérité » judiciaire. En adoptant un comportant loyal, chaque partie apporte sa pierre à la qualité de l’instruction et il est permis, dans ces conditions, de dire que la loyauté des parties est un complément du caractère inquisitorial de la procédure. En conséquence de tout ce qui précède, il est permis de soutenir que, variables au cours de chaque procès, la qualité des écritures et la qualité des comportements offrent une constante : en tant qu’elles influent sur son intelligibilité et sur sa sincérité, les parties influent sur la qualité de l’instruction.