« Félicité rustique » ? L’imaginaire euphorique dans Gemma Bovery de Posy Simmonds

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28 mai 2024

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Florence Godeau, « « Félicité rustique » ? L’imaginaire euphorique dans Gemma Bovery de Posy Simmonds », Déméter. Théories et pratiques artistiques contemporaines, ID : 10.54563/demeter.1436


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L’idée du « Bonheur », sous les formes stéréotypées du couple parfait ou de la famille nucléaire vivant heureuse dans une prairie fleurie, s’est diffusée au xxe siècle par le biais d’un fructueux commerce d’images et d’objets rendus désirables par l’image publicitaire ou les magazines féminins — médias relayés, au xxie siècle, par les comptes Instagram ou Facebook où s’étalent à l’envi maints clichés (au sens photographique comme au sens figuré) censés prouver et fixer dans une certitude pérenne un parfait « bonheur » conjugal, familial, parental, voire professionnel. Le présent article compare Madame Bovary de Gustave Flaubert et le roman graphique de Posy Simmonds, Gemma Bovery (qui fut initialement diffusé dans The Guardian, de 1997 à 1999, avant d’être publié en album par Jonathan Cape puis traduit en français en 2000, chez Denoël) sous l’angle spécifique des représentations textuelles et/ou visuelles qui traduisent à la fois la sensibilité exaltée des héroïnes et leur asservissement aux stéréotypes. La libre transposition de Posy Simmonds, par le biais d’un personnage féminin contemporain, esclave de représentations préfabriquées du « bonheur », de l’« amour » ou du « chic », permet de poser la question de la subjectivation du cliché en même temps que celle du medium. L’iconotexte de Posy Simmonds poursuit en effet, en termes nouveaux, l’ironie propre à Flaubert, celle notamment qui innerve les passages descriptifs et mine les rêveries d’Emma — comme montage de clichés culturels déclinés sur le mode de l’accumulation hétéroclite et de la surcharge esthétique. De manière différente, mais en vertu d’une intention critique analogue, les dessins et le texte de Simmonds (par exemple, le choix du noir et blanc, le cadrage, le graphisme, la juxtaposition cocasse et contrastive des vignettes, la place dévolue au texte) mettent en exergue des points de vue disparates et soulignent le hiatus croissant entre l’imagination de Gemma et sa vie quotidienne. La lecture ironiste suscitée par l’imagerie factice qui fait écran entre les protagonistes et le monde permet in fine d’interroger l’idée éminemment genrée, datée et discutable d’un « bonheur » au féminin nécessairement corrélé à un idéal amoureux.

The idea of “Happiness”, in the stereotypical form of the perfect couple or the nuclear family living happily in a flowery meadow, spread in the 20th century through a profitable trade in images and objects made desirable by advertising or women’s magazines. In the twenty-first century, these images have been relayed by Instagram and Facebook accounts, where countless clichés (in both photographic and figurative signification) are displayed to prove and fix in a perennial and perfect marital, family, parental or even professional “happiness”. This article compares Gustave Flaubert’s Madame Bovary and Posy Simmonds’ graphic novel Gemma Bovery (originally published by The Guardian from 1997 to 1999, then published as an album by Jonathan Cape and translated into French by Denoël in 2000) from the specific angle of the textual and/or visual representations that convey both the exalted sensitivity of the heroines and their enslavement to stereotypes. Posy Simmonds’ free transposition of a contemporary female character, enslaved by prefabricated representations of “happiness”, “love” or “chic”, raises the question of the subjectivation of the cliché as well as that of the medium. Posy Simmonds’ iconotext continues, in new terms, Flaubert’s own irony, particularly that which permeates the descriptive passages and undermines Emma’s reveries - as a montage of cultural clichés declined in the mode of heterogeneous accumulation and aesthetic overload. In a different way, but with a similar critical intention, Simmonds’ drawings and text (choice of black and white, framing, graphics, comical and contrasting juxtaposition of vignettes, place given to text…) highlight disparate points of view and underline the growing gap between Gemma’s imagination and her ordinary life. Lastly, the ironic reading prompted by the artificial imagery that acts as a screen between the protagonists and the world also serves to explore the eminently gendered, dated and controversal idea of a feminine “happiness”, necessarily correlated with an ideal of “love”.

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