9 septembre 2019
http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/
Justine Gardier, « La Belle Époque de l'anorexie. Genèse, traitements et analyse socioculturelle de l’anorexie mentale en France entre 1873 et 1914 », DUMAS - Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance, ID : 10670/1.kjozfu
L’anorexie mentale est aujourd’hui perçue comme une maladie du 21e siècle, engendrée par la grossophobie latente d’une société qui érige la minceur comme un marqueur de réussite et un idéal de beauté. Or, les premières descriptions de cette pathologie par des médecins datent de la fin du 19e siècle. Ceux-ci évoquent déjà avec effarement un mal fréquent, qui toucherait en priorité les jeunes filles des milieux bourgeois entre quinze et vingt ans. À travers l’étude d’une quarantaine de publications médicales, écrites par des médecins de parcours et d’horizons variés, ce mémoire propose de retracer la genèse de l’anorexie en France, entre 1873 et 1914. Le but est ici de comprendre de quelle manière la médecine a appréhendé, conceptualisé puis s’est appropriée et la maladie mais aussi sa thérapeutique, au regard du contexte médical de l’époque. L’étude des critères de guérison de la maladie mais aussi du modèle type de l’anorexique proposé par les médecins dans leurs publications seront analysés dans une perspective de genre. L’anorexie mentale touche, dès sa conceptualisation, une population majoritairement féminine : cette étude se proposera enfin d’interroger les facteurs favorisant la survenue de la maladie dans la société de la Belle-Époque, des injonctions à la minceur aux pressions sociales exercées sur les corps féminins en passant par la moralisation de l’acte de manger. Bien que le corpus de source se compose essentiellement d’écrits masculins, ce mémoire essayera de saisir, à travers ceux-ci, des témoignages de patientes afin de comprendre le vécu de l’anorexie à cette époque. Parce qu’elle touche au physique et au mental, à l’alimentation et aux relations familiales, l’anorexie est une maladie parlante qui, malgré sa grande absence dans l’histoire de la santé, a beaucoup d’informations à nous révéler sur les sociétés dans lesquelles elle se manifeste.