1994
Cairn
John Durham Peters et al., « Au-delà de la peur des images : La réalité de la construction », Hermès, La Revue, ID : 10670/1.ks24fo
A partir d’une réflexion sur la méfiance ou la réprobation à l’égard des images que manifestent plusieurs traditions philosophiques ou religieuse, notamment la Loi mosaïque, la théorie platonicienne, et la tradition des empiristes anglais Bacon, Locke, Hobbes, Hume, cet article propose une analyse plus générale de la nature de la communication et des discours qui s’y rapportent. Cette analyse s’appuie sur quelques exemples empruntés au domaine des médias, mais elle ne porte pas exclusivement sur ce domaine. Elle vise à démontrer que la production d’images à laquelle se livrent les médias, loin d’éliminer la possibilité d’une communication véritable, révèle en fait certaines des caractéristiques propres à toute communication. Ces caractéristiques étaient longtemps restées implicites. Avec l’événement des médias, elles émergent au grand jour, réactivant les craintes qui sous-tendent les grandes traditions iconoclastes. Ces caractéristiques renvoient à la thèse bien connue d’une construction sociale de la réalité. La position défendue ici est que, loin de devoir mener à un scepticisme généralisé, ou à une herméneutique du soupçon avant tout soucieuse de démasquer l’artifice ou la manipulation, le caractère construit des phénomènes sociaux ne s’oppose en rien à leur réalité. On peut alors parler non seulement d’une « construction de la réalité » mais aussi d’une « réalité des constructions », et soutenir avec Lewis Mumford, que ce qu’on baptise le « réel », n’est rien d’autre que le « résultat d’une multitude de transactions et d’échanges continus entre l’organisme humain et son environnement ».