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Gérard Cohen-Jonathan, « Les lignes de force de l'évolution du droit de la Convention européenne des droits de l'Homme et du contrôle de son application », Revue québécoise de droit international, ID : 10670/1.kyr9as
Pour l'essentiel, le droit de la Convention européenne a subi depuis cinquante ans une double évolution, l'extension de son empire étant prolongée par une meilleure application au niveau national. En dehors de la diversité des droits eux-mêmes, l'extension du droit de la Convention doit beaucoup aux méthodes retenues par la Cour européenne pour les interpréter, d'une manière toujours dynamique et finaliste. Les voies de cette extension sont nombreuses, qu'il s'agisse, par exemple, de l'interprétation fonctionnelle des limitations de souveraineté ou de la théorie des «obligations positives». Ces efforts ne dispensent pas d'apporter à la Convention, le cas échéant, un complément normatif. Un réel ordre européen des libertés requiert encore une amélioration apportée au niveau de l'application de ces normes en droit national, non seulement dans le cadre de l'exécution des arrêts, mais en dehors même de tout contentieux. Dans les deux cas, c'est l'idée de prévention qui domine. Comme en matière de mesures conservatoires ou provisoires, la pratique du Comité des droits de l'Homme des Nations Unies révèle une remarquable synergie. Ces progrès ne doivent pas faire oublier cependant la nécessité d'une meilleure cohérence et d'une transparence accrue de la jurisprudence européenne. L' «ordre européen des libertés», que l'on porte haut, interdit plus que jamais les errements. Désormais seule à instruire les requêtes des individus, qui -phénomène unique au monde -s'adressent directement à elle, la Cour de Strasbourg doit faire face à une surcharge de travail qui expose paradoxalement l'individu au risque de déni de justice, et qui rend la réforme urgente, afin de suppléer aux faiblesses de la réforme introduite par le Protocole 11. Au moment de la rédaction de cette étude, la Conférence ministérielle européenne sur les droits de l'Homme ne s'était pas encore tenue. Des nombreuses interventions, de la Déclaration politique et des résolutions adoptées, il résulte la volonté la plus large de réaffirmer le rôle central que la Convention doit jouer en tant qu' «instrument constitutionnel de l'ordre public européen». C'est pourquoi, tout en saluant l'adoption d'une Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les Ministres veulent éviter tout conflit entre les deux systèmes de protection et évoquent à nouveau l'adhésion de la Communauté à la Convention. Concernant le nouveau Protocole 12 sur la non-discrimination, il a été, dès le 4 novembre, signé par 25 États.