Autodafé à Istanbul. La première crise négationniste de la Turquie nationaliste (1935)

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5 juillet 2023

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Emmanuel Szurek, « Autodafé à Istanbul. La première crise négationniste de la Turquie nationaliste (1935) », Cahiers de la Méditerranée, ID : 10670/1.llafpb


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Le 15 décembre 1935, quelques notables et membres de la communauté arménienne d’Istanbul se réunirent sur le parvis de l’église de Pangaltı, à la sortie de la messe, pour brûler solennellement un portrait de Franz Werfel ainsi qu’une boîte cartonnée représentant son dernier livre, Les Quarante jours du Musa Dagh (1933). On chanta l’hymne national turc. Dans ce roman, l’écrivain juif viennois exposait pour la première fois, aux yeux du grand public lettré international, les rouages de l’extermination des Arméniens pendant la première guerre mondiale, en même temps qu’un acte de résistance réussie de ces derniers face à l’armée ottomane. C’était aussi un livre hanté par la montée du nazisme et traversé par une inquiétude latente quant à l’avenir des Juifs d’Europe. Rapidement, la Metro-Goldwyn-Mayer manifesta, depuis les États-Unis, son intention d’en tirer un film. Une telle publicité apportée soudainement à un crime consciencieusement occulté depuis une décennie ne tarda pas à susciter la mobilisation des autorités et de la diplomatie turques, relayée par une presse aux ordres, dans une tonalité fiévreusement nationaliste, anti-arménienne et bientôt antisémite. Arméniens et Juifs de Turquie furent néanmoins « convaincus » de joindre leur voix à cette symphonie patriotique. Le présent article analyse ainsi ce que la campagne orchestrée par Ankara contre Werfel, et tout particulièrement l’autodafé du 15 décembre, peuvent nous apprendre de l’histoire longue de la négation turque du génocide des Arméniens, phénomène dont il propose une nouvelle périodisation autant qu’une requalification.

On 15 December 1935, some notables and members of the Armenian community in Istanbul gathered in front of the Pangaltı church after mass to solemnly burn a portrait of Franz Werfel and a cardboard box representing his last book, The Forty Days of Musa Dagh (1933). The Turkish national anthem was sung. In this novel, the Viennese Jewish writer exposed for the first time to an international literary audience the workings of the extermination of the Armenians during the First World War, as well as an act of successful resistance by the Armenians against the Ottoman army. It was also a book haunted by the rise of Nazism and riddled with latent anxiety about the future of European Jewry. Shortly after its release, Metro-Goldwyn-Mayer in the United States expressed its intention to make a film of it. Such sudden publicity for a crime that had been conscientiously concealed for a decade did not take long to mobilise the Turkish authorities and diplomacy, relayed by a press under orders, in a feverishly nationalistic, anti-Armenian and soon antisemitic tone. Armenians and Jews in Turkey were nevertheless “convinced” to join their voices to this patriotic symphony. This article analyses what Ankara’s campaign against Werfel, and especially the auto-da-fé of 15 December, can teach us about the long history of Turkish denial of the Armenian genocide, a phenomenon that it proposes to reperiodise as well as recharacterise.

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