28 octobre 2023
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Juliette Azoulai, « La Mer de Michelet. Une genèse de la peau », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.lrcb8j
Dans le chapitre « Genèse de la mer » de son essai de 1861, Michelet présente un récit de l’évolution des espèces, de l’infusoire marin au lamantin, dans lequel la question de l’enveloppe tient une place centrale (« l’enveloppe, toujours l’enveloppe ») : de la coquille des mollusques (obsédés, selon l’essayiste, par le problème de la protection) à la peau des baleines (« qui frémit et vibre à tout »), en passant par la carapace des crustacés (véritable armure médiévale) et les écailles du poisson (armure souple et donc révolutionnaire), se lit un trajet progressif, qui dessine un accès à l’individuation tout en ménageant une possibilité de relation de l’individu avec le monde extérieur, de contact avec les autres. Ainsi les mammifères marins, au sommet de l’échelle de vivants produits par le milieu océanique, vont, selon lui, jusqu’à développer une faculté de tact et un sens de la caresse. Cet article se propose de suivre à la trace ce motif de l’enveloppe, afin de comprendre comment Michelet, à travers sa vision anthropomorphique de l’animalité marine, propose une sorte de généalogie phénoménologique de la peau et y rattache un certain nombre de valeurs éthiques, voire politiques, fondamentales : sécurité, liberté, communication, mobilité, tendresse, amour, etc.