2006
Cairn
Lionel Richard, « Thomas Mann confronté à la tradition de l'humanisme occidental », Revue de littérature comparée, ID : 10670/1.lyvvod
Thomas Mann se plonge dans le Don Quichotte de Cervantès en 1933-1934, après avoir quitté l’Allemagne nazie pour s’installer à Zurich avec sa famille. C’est l’époque où, travaillant au troisième tome de sa tétralogie romanesque Joseph et ses frères, il s’efforce de se documenter sur le fonctionnement social des mythes en Occident. Il a pris conscience, en effet, du danger que la propagande politique du Troisième Reich, en s’appuyant sur un germanisme mythique, fait courir aux valeurs humanistes. Sur ces entrefaites, il est invité à New York et s’y rend par bateau en mai-juin 1934. À son retour, entremêlant les expériences de sa traversée maritime et ses précédentes notes de lecture dans son Journal, il élabore un récit de voyage auquel il donne une portée symbolique et qu’il publie en novembre 1934. Par le biais de cet artifice littéraire, il suggère que les contradictions entre l’Idéal et la Réalité, entre la Nature et la Culture, ne sont jamais appelées à se résoudre qu’au profit de « l’humain », dans la filiation de la longue tradition humaniste occidentale à laquelle appartient justement le roman de Cervantès.