14 août 2024
Isabelle Ligier-Degauque, « Les Filles errantes de Regnard », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.m3y4fd
"Les Filles errantes" est la cinquième pièce que Regnard fait jouer à la Comédie-Italienne, le 24 août 1690. De la structuration originale en trois actes il ne reste que huit scènes françaises dans la version revue en 1700 par Gherardi pour le tome III du "Théâtre italien". Jouée alors que la guerre de la Ligue d’Augsbourg (1688-1697) connaît une acmé de combats durant l’été 1690 – seulement deux mois après la bataille de Fleurus (1er juillet 1690) et la victoire navale du Cap Bézeviers (10 juillet 1690) –, la comédie de Regnard prend pour cible "les désastres de la guerre". "Les Filles errantes" ne sont, certes, pas l’équivalent au XVIIe siècle de la série des gravures de Goya ("Los Desastres de la Guerra", 1810-1815), mais la satire en direction de ceux qui font profession d’armes est d’une truculence incisive, et mêle aux topoi de l’antimilitarisme des effets d’actualité auxquels le public français devait être très sensible. Cependant, Regnard n’écrit pas une pièce à thèse et exploite les ressources de la comédie italienne, en incluant une intrigue sentimentale (autour d’Isabelle et Colombine) qui donne des amours du temps une image aigre-douce.