2017
Cairn
Jean-François Nieus, « Le rôle Super militibus de la seigneurie de Picquigny (1192/1199) : l’écrit au secours d’une société châtelaine en crise ? », Revue du Nord, ID : 10670/1.mdlqx0
Le plus ancien document des archives des seigneurs de Picquigny (Fr., dép. Somme) est un rouleau intitulé Super militibus, datable des années 1190, dans lequel sont énumérés les noms, les services et les fiefs de 125 vassaux liés par l’hommage au sire Enguerran (Paris, AN, R1 675/1). De cet écrit exceptionnel, rapidement analysé en 1968 par Robert Fossier, qui y a vu l’indice d’une féodalisation tardive et un peu artificielle de l’espace picard, la présente étude propose une interprétation nouvelle, diamétralement opposée à celle du regretté médiéviste. Le rôle Super militibus, très focalisé sur les services de garnison dus au sire par ses principaux vassaux, en particulier par un groupe d’une trentaine de gardiens « permanents » de la forteresse de Picquigny, témoigne en réalité de l’ancienneté de cette organisation militaire, de sa déliquescence après le milieu du xiie siècle et des efforts déployés par l’entourage du sire pour en sauvegarder les principales modalités. Le recours à l’écrit – assez neuf en milieu seigneurial – vise ici à figer un état de choses traditionnel, non à infléchir le réel dans un sens nouveau. Une transcription du rôle Super militibus est proposée en annexe.