1 septembre 2022
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Félix Tréguer, « Face à l'automatisation des bureaucraties d'État, l'accommodement ou le refus ? », HAL-SHS : sciences politiques, ID : 10670/1.me9tad
Alors que l’informatique appliquée est entrée dans une nouvelle phase de son histoire à la suite des progrès réalisés dans les techniques dites d’« intelligence artificielle », ce chapitre part du constat d’une automatisation croissante des bureaucraties d’État dans différents champs des politiques publiques. Face aux résistances et aux enjeux politiques soulevés par cette nouvelle donne socio-technique, on assiste au retour en force de réglementations consistant à garantir la transparence, l’« explicabilité » et l’« auditabilité » des algorithmes, ou encore à réduire autant que faire se peut les risques pour les droits fondamentaux au travers d’approches dites de « privacy-by-design » et de chartes éthiques à l’attention des développeurs. Or, il est frappant de constater les similitudes entre ces préconisations et les règles adoptées à l’époque du premier cycle d’informatisation de la société, dans les années 1960-1970. Afin de mettre en évidence cet « éternel retour » de modes devenus routiniers de gestion des controverses liées au numérique, ce chapitre propose de replacer l’automatisation actuelle des bureaucraties publiques dans une histoire plus longue de l’État et de l’informatique. Il s’agit ainsi de montrer que cette focale procédurale par laquelle on tente aujourd’hui de conjurer les dangers de l’informatique risque non seulement de se solder par un échec, mais qu’elle élude aussi nombre des enjeux démocratiques soulevés par la démultiplication des technologies numériques au sein des administrations et, plus largement, dans l’ensemble du monde social.