2015
Emmanuelle Andres, « A Mercy : les lettres-paroles de Florens, ou la prose du monde ordinaire », HAL-SHS : histoire, ID : 10670/1.mrsiz0
Si l’oralité qui est au cœur des romans de Toni Morrison a été très largement reconnue par la critique, cette forme si particulière de dire-écrire revêt une importance toute particulière dans son dernier roman, A Mercy (2008). Pénétrant la forme et le fond du roman, les « lettres-paroles » de Florens s’inscrivent dans l’acte d’écriture. Dès le début du roman, Florens prévient le lecteur que son récit ne sera pas une « confession » au sens classique du terme ; elle est au contraire une confession « pleine de ces curiosités qui ne sont familières que dans les rêves et durant ces moments où le profil d’un chien se dessine dans le plumet de vapeur s’élevant d’une bouilloire » (Morrison 2009a : 9). Dans ces toutes premières lignes, l’objet issu des repères familiers du lecteur devient le point de rencontre de l’ordinaire et de l’imaginaire. Au cours de cette analyse, je m’appliquerai à montrer comment l’ordinaire familier devient, littéralement, et totalement, l’objet vivant du dire de Florens. Ainsi, l’acte narratif et le langage donnent l’impression d’être toujours en mouvement, rejoignant les circuits de l’imaginaire ou cherchant à retrouver, dans leur simplicité première, l’origine des mots.