2002
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Sylvie Patron, « La revue de Georges Bataille (Critique ou la crypte) », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.nqw9sr
Cet article, dont une première version a été prononcée dans le cadre d'un colloque, "Les revues littéraires au XXe siècle", à l'Université de Bourgogne, part de l'affirmation que Critique n'est pas "la revue de Georges Bataille" comme Les Temps modernes, par exemple, est ou a été celle de Jean-Paul Sartre. Il commence par montrer le décalage et même la rupture des rapports entre Critique et tout ce que Bataille a pensé ou éprouvé jusque là (la tache aveugle de l'entendement, lieu de la poésie, du rire, de l'érotisme, l'instant, la fête, la chance ou l'échéance...). Il constate qu'avec Critique, Bataille fait prendre consistance à l'image la plus négative qui ait été donnée de lui (par André Breton, parlant à son sujet d'un "assis de bibliothèque", par Sartre également) ; Bataille qui explique dans un entretien de presse : "L'origine de Critique est liée au fait que j'ai passé une dizaine d'années au service des périodiques à la Bibliothèque nationale...". Le sérieux, la discipline, le respect des spécialités, le sens de l'organisation sont les qualités qu'il met en œuvre et qu'il réclame de ses collaborateurs, à la direction de Critique. Il n'est pas jusqu'à la présentation matérielle des articles qui ne rappelle la fiche -- tous les témoignages s'accordent à dire que Bataille y apporte le plus grand soin. La deuxième partie de l'article explique que c'est après la mort de Bataille, sous la direction de Jean Piel, que Critique devient véritablement "la revue de Georges Bataille". Il y a d'abord le numéro d'"Hommage à Georges Bataille" d'août-septembre 1963. Il y a aussi la présence au conseil de rédaction de jeunes intellectuels, comme Michel Foucault, Michel Deguy, Roland Barthes ou Jacques Derrida, pour qui Bataille est l'une des références majeures. Ce Bataille, "Bataille, la peur", pour reprendre le titre d'un fragment du Roland Barthes par Roland Barthes, est très loin imaginairement de "l'autre Bataille", le Bataille de Critique, dont le souvenir est rappelé dans certaines lettres de lecteurs. "La revue de Georges Bataille" : l'expression fait retour au début des années 80, sous la plume d'un ancien collaborateur de Critique, Jean-Marie Benoist, en réponse à l'article qu'un autre collaborateur, Jacques Bouveresse, lui a consacré dans Critique. La troisième partie de l'article revient sur l'affaire Jean-Marie Benoist-Jacques Bouveresse, liée à la publication du numéro "L'année politico-philosophique : le comble du vide", qui valut un procès à la revue. Elle montre que l'appropriation de Bataille est l'enjeu d'une polémique qui, dépassant Benoist et Bouveresse, oppose la direction de Tel Quel aux nouvelles orientations philosophiques prises par Critique (de là la comparaison, due à Philippe Sollers, de Critique à une crypte, qui se retrouve dans le titre de l'article).