« Les lieux d’une ruse », la mystification comme discours romanesque sur la peinture

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17 novembre 2014

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Loïse Lelevé, « « Les lieux d’une ruse », la mystification comme discours romanesque sur la peinture », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.ocry15


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Résumé Fr

De son dernier roman, Les Onze (2009), Pierre Michon déclarait qu’il avait été écrit pour répondre à cette question : « pourquoi la Révolution n'a pas produit d’œuvres d'art à la hauteur de l'événement ? », pourquoi c'est à la littérature qu'il revient d'inventer le tableau de la Terreur, en l’occurrence ce tableau fictif éponyme que le récit s’efforce de faire passer pour réel, appartenant au monde du lecteur. À la fin du vingtième siècle et au début du vingt-et-unième, une partie de la production romanesque a ainsi été marquée, dans un contexte de jeu postmoderne avec les codes et les références culturels, par l’invention de tels tableaux trompeurs, fictionnels et non seulement fictifs, qui ont pour trait commun d’être présentés comme des « combles » de peinture : on songe, par exemple, au Cabinet d'amateur (1979) de Georges Perec, véritable tableau-musée qui remet en question le discours de l’histoire de l’art, dans sa linéarité et dans ses processus d’évaluation et d’attribution ; au tableau de La Tabla de Flandes (1990), d’Arturo Pérez-Reverte, qui contient, chiffrées sur la toile, la clé d’une énigme historique et la prédiction des meurtres à venir au cours de ce roman policier ; ou aux Onze lui-même, la Terreur faite peinture. L’insertion de tels tableaux dans le roman permet de contester deux types de discours prédominants, à la même époque, dans le champ esthétique : d’une part, le discours de l’histoire de l’art et sa prétention à détenir une vérité sur la peinture ; d’autre part, un discours critique qui, remettant en question le modèle linguistique d’analyse de la peinture, sépare strictement celle-ci de la littérature et en fait deux objets irréconciliables : la littérature ne pourrait, au mieux, saisir de la peinture que ce qui relève du lisible et donc du scriptible. Comment le tableau fictionnel permet-il au roman de dépasser cette opposition binaire et de proposer une nouvelle manière de lire la peinture ? Le processus de mystification qui découle de sa création vise, d’abord, à proposer un discours alternatif, littéraire, sur la peinture, qui passe par une remise en cause de la linéarité du discours historique ; ensuite, à travers la création d’un objet textuel, le tableau fictif, à créer un espace romanesque dans lequel la peinture n’est pas posée comme un objet ineffable, mais comme ce qui ne peut s’appréhender que dans et par le langage. À travers le prisme de la peinture, ce sont donc ses propres limitations et sa propre structure que le roman interroge : le faux tableau est à l’origine de l’invention d’un nouveau type de récit, ludique et ambigu, dans lequel des notions comme l’Histoire et la vérité sont littéralement mises en jeu.

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