2021
Cairn
Elena Pulcini, « Féminisme et convivialisme », Revue du MAUSS, ID : 10670/1.omuya9
Y a-t-il des convergences entre féminisme et convivialisme ? Ce sont sans doute deux perspectives radicales qui partent de la critique de l'individualisme, de l'hubris et du caractère illimité du sujet moderne pour réévaluer des valeurs refoulées telles que la relation et l'interdépendance, le care et le don : sur lesquelles on peut dessiner, comme on le lit dans le Manifeste, « les contours d'un autre monde possible ». Mais le féminisme met surtout l'accent sur les fautes de la culture masculine et patriarcale et sur la nécessité de dévoiler les formes de domination les plus cachées et apparemment les plus naturelles. Cela conduit inévitablement à ce conflit entre les sexes qui dégénère aujourd'hui en formes ressenties de violence masculine et qui peut mettre à rude épreuve la nécessaire alliance entre féminisme et convivialisme. À la légitime revendication de reconnaissance par les femmes de leur dignité, doit répondre alors la volonté des hommes de briser la colonisation patriarcale de leur imaginaire pour s'engager finalement dans la relation sur un pied d’égalité. De manière à réussir non seulement à « s'opposer sans se massacrer » – comme le dirait Mauss – mais à trouver de nouvelles formes d’alliance appropriées à une société convivialiste.