23 juin 2022
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Reine Sandrine ANDONG BAUBEBET, « Le colonialisme écologique, destructeur de l'État au Gabon », HAL-SHS : géographie, ID : 10670/1.oov1a9
Depuis la fin des années 1980 et l'avènement du paradigme intégrationniste dans la gestion des espaces naturels protégés (Depraz, 2008), les parcs nationaux sont invités à concilier leurs politiques de conservations avec le développement humain approximatif. C'est dans ce contexte qu'en 2001, sous l'impulsion du WWF (World Wide Fund for Nature) et du WCS (Wildlife Conservation Society), organes de l'UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature), les réserves coloniales du Gabon sont transformées en parcs nationaux du Gabon (PNG). En 2009, dans un contexte de crise pétrolière, le candidat à la présidentielle gabonaise décide de relancer l'écotourisme dans ces parcs nationaux. Ce projet porte plusieurs ambitions :-la conservation de l'environnement naturel pour les besoins de la planète ;-le développement de l'écotourisme pour promouvoir la nature et les cultures locales ;-le développement économique, pour dynamiser l'économie locale et diversifier l'économie nationale ;-le développement rural, pour fixer les populations. Par ailleurs la réussite de ce projet reste conditionnée par une approche collaborative entre les acteurs internationaux engagés dans la promotion des PNG (État, opérateurs économico-politiques, WWF, WCS, UICN…) et les populations locales. Finalement, de 2016 à 2025, cette gouvernance participative de l'écotourisme aboutirait à « la prospérité pour tous » et à « l'émergence du Gabon ». Or, à partir de 2015, les enquêtes in situ menée à Minvoul près du parc national de Minkébé au nord du Gabon et à la Lopé dans le parc national de la Lopé au centre du pays soutenaient qu'en matière d'écotourisme dans les PNG :-la pratique touristique était naturelle, car dépourvue d'empreinte culturelle ;-la dynamique économique était nulle au niveau local et invisible à l'échelle nationale ;-les territoires ruraux connaissaient un état de dégradation avancée, faute d'infrastructures, de voies et moyens de communication…-En revanche, malgré les exactions enregistrées au coeur des parcs gabonais, globalement la préservation environnementale constituait une exception du projet. En outre, les enquêtes soutenaient unanimement que les populations locales n'étaient pas intégrées dans le projet en raison de la « prématurité du secteur » (administration) et de la « politisation du projet » (ruraux). Les résultats locaux de cette exclusion communautaire étant le sous-développement socioéconomique et territorial dénoncé par les populations, l'exode rural et la désertification des villages, la pléthore des villes, la dégradation des conditions de vie et les contestations politiques qui en résultent dès l'année 2016. Au regard de l'origine coloniale des PNG, de la philosophie de gestion des acteurs au fondement de ces parcs nationaux et compte tenu de l'exception environnementale du projet d'écotourisme porté par ces supports, dans quelle mesure le colonialisme vert (Blanc, 2020), entendu comme la gestion exogène des ressources endogènes, peut-il participer à l'accélération du sous-développement régional au Gabon ?