7 décembre 2015
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Frédérique Lecerf, « Aurum ex machina : esthétique de l’or dans l’art contemporain », Theses.fr, ID : 10670/1.osew7p
Jusqu’à quelques années en arrière, pouvait encore prévaloir le préjugé que l’or cesse d’occuper une placeprépondérante dans l’histoire de l’art après que l’Antiquité et le Moyen Âge en aient fait le parangon de lavaleur, du beau et du divin. Si le Baroque et l’Art Nouveau offrent, manifestement, quelques magnifiquesoccurrences dorées, celles-ci pouvaient être considérées comme purement décoratives, ce qui permettaitparfois d’en disqualifier esthétiquement les périodes et les styles. Un examen objectif de la production artistique de la période moderne et contemporaine montre pourtant que, si l’étalage de l’or semble incompatible avec certaines thèses des avant-gardes artistiques en raison des connotations symboliques (principalement religieuses et politiques) attachées à son prestige et à sa préciosité, les artistes n’ont, de fait, jamais renoncé à en faire usage, encore que de façon plus ou moins subreptices. L’ambition de cette étude est de montrer que l’usage de l’or dans le monde de l’art de la période récente, s’il répond à des programme esthétiques singuliers et, parfois, contradictoires entre eux, partage aussi le fait qu’il vise toujours à produire un maximum d’effet sur ses usagers (artistes et spectateurs). C’est pourquoi nous utilisons ici la formule « aurum ex machina » car il nous semble que l’or, tel le dieu antique qui vientartificiellement dénouer la représentation (« deus ex machina »), arrive toujours à brûle-pourpoint dans laproduction ou la carrière d’un artiste plasticien de manière à sidérer (par sa beauté, sa brillance, sonintelligence, etc.) celui qui en perçoit sensiblement l’intensité. À travers de nombreux exemples, c’est cefonctionnement machinique de l’or que nous tentons d’analyser en déclinant plusieurs modalités d’action del’or dans l’art contemporain et en distinguant, de manière empirique, ce qui relève du concept (l’or commemachine réfléchissante), de la performance (l’or comme machine spectaculaire) et de l’érotisme (l’or commemachine désirante). Pour autant qu’on en puisse juger, le début du XXIe siècle, marqué, à la fois, par untriomphe éhonté et une crise profonde du capitalisme, offre aux artistes d’aujourd’hui, la perspective, à la foisdécomplexée et plus complexe que jamais, d’un or qui, pour être vraiment contemporain, n’en reste pas moins éternel