15 juillet 2021
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Joachim Zemmour, « (Wo)men-flowers and Urban Gardens in the Weird Fiction of Clark Ashton Smith: Vegetal Hypallage as an Ecopoetic Device », Textes et contextes, ID : 10670/1.po5aln
L’un des aspects fondamentaux et fondateurs de la SF/fantasy a toujours été, aussi bien à ses débuts qu’à l’époque moderne, le désir d’un ‘retour’ vers le naturel et le sauvage en réponse à l’urbanisation conquérante, une volonté de respiritualiser la nature. À cet égard, certains textes de littérature SF semblent s’inscrire dans ce que Lawrence Buell a décrit, dans The Environmental Imagination (1995), comme ‘la littérature environnementale’. Or, les nouvelles de C. A. Smith répondent à plusieurs des critères établis par Buell pour définir ce que serait un ‘texte environnemental’. En effet, l’œuvre de l’auteur californien est parsemée de descriptions fantasmagoriques de jardins urbains (ré)enchantés, où la nature, sous des allures idylliques, s’avère toutefois pernicieuse et vengeresse. Dans ces jardins luxuriants, d’étranges créatures mi-plantes mi-hommes/femmes, ou mi-animales, règnent parfois de manière despotique sur une humanité opprimée, réduite en esclavage. C. A. Smith y dépeint l’image d’une nature non seulement consciente, dotée d’une âme et d’une volonté propres, mais aussi capable de s’auto-protéger en détruisant ses propres destructeurs. Les créatures hybrides qu’il invente nous interrogent profondément sur la limite entre l’humain et le non-humain, l’animal et le végétal, et la langue onirique de C. A. Smith contribue à suggérer cette hybridité dans l’esprit de la lectrice/du lecteur. Ainsi, à travers la figure de style qu’est l’hypallage, l’écopoète californien invite à un ‘ensauvagement’ de l’homme et de la femme urbain.e, et la littérature environnementale se fait le lieu symbolique de cet ensauvagement, comme un appel prophétique à l’irruption du sauvage au sein même de la ville. Au cœur de l’espace urbain, l’écopoésie devient elle-même jardin imaginaire, parole visionnaire.