Saisir la socio-matérialité du droit administratif : juriDict et l’infrastructure juridico-technique du Conseil d’État belge

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Depuis plus de 15 ans, le Conseil d’État belge publie en ligne ses arrêts et ordonnances de non-admission. La navigation et la recherche dans les banques de données jurisprudentielles de l’auditorat est rendue possible via l’application juriDict. Cette application ouverte et gratuite est devenue un outil incontournable en droit administratif. Considérant juriDict comme un « assemblage socio-matériel », le présent article vise à décrire le travail de conception, de développement, de maintenance et d’utilisation de cet outil permettant au droit de se faire, c’est-à-dire de se lire, de s’écrire et de se diffuser. En se basant sur une recherche sociologique empiriquement ancrée et de nature compréhensive, les auteurs saisissent d’abord les agencements d’acteurs humains et non humains – citoyens, fonctionnaires, juristes, informaticiens, documentalistes, langages, codes, points de droit, moyens, scripts, écrans, souris, algorithmes, etc. – qui composent l’infrastructure juridico-technique de la juridiction administrative. L’analyse rend ensuite compte de la redéfinition des pratiques, des savoirs et des interactions qui permettent au droit d’exister. Cette contribution souligne enfin certaines conditions sociotechniques préservant l’État de droit dans un contexte d’ouverture de l’accès à la justice et au droit.

For more than 15 years, the Belgian Council of State has been publishing its judgments and non-admission orders online. Browsing and searching the Auditorate case law databases is made possible via the juriDict application. This free and open application has become an indispensable tool in administrative law. Considering juriDict as a « socio-material assemblage », this article aims to describe the design, development, maintenance and use of this tool that allows the making of law, i.e., its reading, writing and dissemination. Based on a grounded and comprehensive sociological research, the authors first grasp the arrangements of human and non-human actors – citizens, lawyers, computer scientists, documentalists, languages, codes, points of law, means, scripts, screens, computer mouse, algorithms, etc. – that make up the legal-technical infrastructure of the administrative jurisdiction. The analysis then reports on the redefinition of the practices, knowledge and interactions that allow the law to exist. Finally, this contribution underlines some socio-technical conditions preserving the rule of law in a context of open access to justice and law.