2018
Cairn
Bruno Evans, « De l’unité à la division. Comment la jalousie a contribué à l’échec du capitalisme familial. Le cas des entrepreneurs du peigne en Pays d’Olmes, au pied des Pyrénées », Entreprises et histoire, ID : 10670/1.q79xoe
Le Pays d’Olmes, à une centaine de kilomètres au sud de Toulouse, est un territoire dont la pauvreté des terres a, de longue date, poussé ses habitants à recourir à des compléments de revenus, en particulier industriels. Outre la sidérurgie et le textile, il produisait des bijoux en jais et des peignes. Au cœur de leur échec final réside un facteur longtemps sous-estimé par les historiens économistes en raison de leur préférence pour des données plus aisément quantifiables : les affects. La communauté protestante des villages de Léran, Le-Peyrat et La-Bastide-sur-l’Hers s’y spécialisa dans la fabrication de bijoux en jais et de peignes. Du XVIIIe siècle aux années 1840, elle fut soudée par des valeurs communes : le travail, la religion réformée ainsi que des idées libérales et républicaines. En raison de sa faiblesse démographique, les renchaînements d’alliances y furent nombreux. De plus, le système productif incorporait les différentes branches d’une même famille. Avec la mécanisation et une plus grande ouverture au monde, les années 1840 marquèrent l’apogée de ce capitalisme familial. Cependant ce développement fut inégal : le succès de Léo Bez fit des envieux. Ainsi émergea une émotion fortement négative, la jalousie.Désormais les principaux entrepreneurs, tous apparentés, se divisèrent. Les rivalités familiales, largement motivées par la jalousie, entraînèrent une lutte interne dans laquelle tous les coups furent permis et constituèrent un élément important du déclin d’un capitalisme familial séculaire. S’il faut bien sûr se garder de généraliser ce cas à outrance, il n’en demeure pas moins qu’il a une portée bien plus large que le seul Pays d’Olmes.