Valeurs, significations des lieux et attachement

Résumé Fr

Parmi les ouvrages hydrauliques aujourd’hui concernés par des projets de démantèlement ou plus largement d’ingénierie écologique, un grand nombre est hérité d’anciens moulins à eau. Toutefois, la cartographie des anciens moulins à eau et celle des obstacles à l’écoulement ne se superposent pas. En effet, beaucoup de moulins ont totalement disparu, certains sont orphelins de leur dispositif de retenue et à l’inverse d’autres seuils d’anciens moulins ne sont plus associés à du bâti ancien. Enfin, la base nationale des obstacles à l’écoulement comprend bien d’autres ouvrages hydrauliques (buses, radiers de pont, grands barrages, seuils d’irrigation ou d’agrément, etc.). Malgré ce constat, on peut considérer que la part des anciens sites de moulins à eau parmi les sites recensés comme représentant une contrainte écologique est relativement conséquente. En l’état actuel, il est difficile d’estimer précisément le pourcentage d’anciens moulins à eau dans la base de données du référentiel des obstacles à l’écoulement. Les situations sont très variables d’un cours d’eau à l’autre sur le plan de la nature des ouvrages, de leur histoire et de leur niveau d’intégrité. C’est d’ailleurs sans doute l’un des problèmes dans la mise en débat du devenir des sites hydrauliques. En effet, il existe encore un différentiel qualitatif important entre les données fournies à l’échelle nationale qui demeurent assez pauvres sur le plan géohistorique et les données produites localement, à l’échelle des bassins versants, des vallées ou encore des masses d’eau, qui permettent de renseigner plus précisément les trajectoire des paysages de rivière. Ce constat étant établi, nous souhaitons précisément centrer notre propos sur les anciens sites de moulins à eau afin de proposer une synthèse établie sur la base de travaux de recherche précédents (Barraud, 2007 ; Germaine, 2009 ; Lespez, 2012 ; Barraud et Germaine, 2017a et 2017b). Cette synthèse sera structurée autour de trois sous-thèmes et questionnements. Premièrement, Il s’agira d’interroger les valeurs qui ont été progressivement affectées à ces sites hydrauliques. Ceux-ci seront ici appréhendés en tant que lieux, objets scientifiques, patrimoines et géosymboles. Dans un deuxième temps nous proposerons un changement d’échelle afin d’identifier les grandes étapes de la construction sociale des paysages de rivières interprétés cette fois-ci sous l’angle d’une ressource territoriale. Troisièmement, nous rendrons compte de quelques modalités d’attachement des gens à ces lieux spécifiques, en tentant de dépasser la rhétorique patrimoniale classique.