2018
Cairn
Kristine Plouffe-Malette, « La moralité publique comme exception : l’apport potentiel des enseignements de la Cour européenne des droits de l’homme pour une interprétation renouvelée au sein de l’Organisation mondiale du commerce », Revue internationale de droit économique, ID : 10670/1.qvlavl
Depuis 1995, des membres se sont régulièrement joints à l’Organisation mondiale du commerce, formant ainsi une mosaïque complexe d’États hétérogènes qui comprend une variété de cultures, de religions, de pratiques et de coutumes. Cette diversité croissante pose plusieurs défis importants, particulièrement quant à la possibilité de limiter le commerce en raison des préoccupations citoyennes qui émanent de tous les membres. Comment un État peut-il répondre aux demandes formulées par sa population tout en respectant ses engagements en faveur des autres membres ? L’exception de moralité publique a consisté en une réponse, laquelle a été étudiée à quatre reprises par les organes quasi juridictionnels de l’OMC. Si les quatre mesures défendues ont été reconnues comme relevant de l’ordre de la moralité publique, aucune n’a pu franchir la totalité des tests commerciaux et être entièrement justifiée. Les lacunes et les interrogations relatives à l’interprétation de cette exception, tout comme le nouvel engouement qu’elle suscite, méritent que l’on s’y attarde. Pour ce faire, cet article propose de revisiter l’exception de moralité publique à la hauteur de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui, elle aussi, interprète l’expression de la moralité publique, et ce depuis plus de quarante ans. Elle a su, au travers de sa jurisprudence, développer une approche unilatérale de la norme morale et inscrire la nécessité d’une telle ingérence dans l’exercice et la jouissance des droits et libertés dans une perspective consensuelle. Il est posé comme postulat que les organes quasi juridictionnels de l’OMC pourraient faire de même, et ce dans le but de respecter la nature de la norme.