29 juin 2016
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Mathieu Pelat, « Les identités ethniques en Novempopulanie, Wasconie et Aquitaine dans l’Antiquité tardive et au haut Moyen âge (IIIe-IXe siècle) », Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance, ID : 10670/1.qx5d13
Si l’historiographie a longtemps insisté sur l’identité des Neuf Peuples, pourtant, cette ethnicité pourrait se révéler plus plastique et intégrante qu’on ne l’a supposé. Quant à l’Aquitaine entre Garonne et Loire, il semble peu crédible de conjecturer un retour à des traditions celtiques ou un attachement inconditionnel à la romanité, après la disparition du cadre impérial. Enfin, les influences gothiques et franques restent peu visibles. L’idée d’une identité gothique insoluble dans la romanité – qui expliquerait l’effondrement du royaume de Toulouse face à Clovis – relève d’un débat faussé par l’œuvre polémique de Grégoire de Tours. La thèse d’un rôle central des « envahisseurs » Wascons dans l’identité de laNovempopulanie du VIe siècle paraît également devoir être remise en question. En effet, le témoignage de Grégoire de Tours est, là encore, peu fiable et s’intègre dans une tradition qui utilise l’ethnotype wascon comme synonyme de barbarie. Les Francs semblent avoir ethnicisé des révoltes nobiliaires répétitives dans une marche qu’ils contrôlaient mal. Au VIIe siècle, alors que l’historiographie défend l’idée de la constitution d’identités spécifiques aux Wascons, d’une part, et aux Aquitains, d’autre part, les sources semblent au contraire montrer un décalage entre une prise d’autonomie politique réelle et un brouillage des étiquettes ethniques par les Francs, pour des raisons politiques. Ainsi, les Wascons sont parfois désignés par des ethnonymes antiques tandis que les Aquitains sont fréquemment qualifiés de Wascons. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit là encore de décrédibiliser des adversaires, renvoyés dans la barbarie. Si l’ethnicité apparaît aux VIIe et VIIIe siècles comme une arme politique – et non comme un instrument de cohésion interne – la constitution du royaume carolingien d’Aquitaine et de la principauté indépendante de Wasconie, au IXe siècle, aurait pu changer la donne. Cependant, nos sources laissent peu de place à d’éventuels particularismes ethniques. Ainsi, les « mémoires » ou « légendes » des Aquitains apparaissent comme des créations de l’historiographie. Le royaume d’Aquitaine et la principauté de Wasconie seraient plus des constructions territoriales que des entités ethniques bien que le caractère très lacunaire de notre documentation empêche d’être trop affirmatif.