9 juillet 2019
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Nicolas Picard, « : L'exemple de la peine de mort en France (XXe siècle) », HAL-SHS : histoire, ID : 10.2307/j.ctvr7f8t1.34
A la différence de l’histoire sociale et de l’histoire politique, l’histoire du droit s’intéresse assez peu à la presse populaire comme source. Les récits des journalistes sont souvent considérés comme non scientifiques, imprécis et émotionnels, éloignés par conséquent des caractéristiques de technique et de rationalité qui seraient inhérentes aux textes juridiques. Dans le contexte d’ouverture de la science juridique aux études littéraires, ces articles souffrent également de leur manque de légitimité par rapport à d’autres formes textuelles plus classiques, le roman ou l’essai. Approximatifs et illégitimes, ces textes figurent donc rarement dans la masse des documents utilisés pour nourrir l’étude de l’évolution du droit. Pourtant, les études littéraires ont montré la proximité des écrits journalistiques avec la littérature, à travers notamment la figure de l’écrivain-reporter, et révéler la possibilité de les étudier comme des textes littéraires. L’objectif de ce papier est de montrer que les études juridiques peuvent s’inspirer de cette démarche afin d’exploiter ces documents en les considérant aussi comme des produits du droit. Je m’appuierai sur l’exemple de mes propres recherches sur l’étude de la peine de mort. La presse joue en effet un rôle dans la formation du droit en influençant la rédaction de lois pénalisant de nouveaux crimes. Elle permet de voir fonctionner la pratique à travers les chroniques judiciaires et permet aux lecteurs-citoyens de se constituer une culture légale vulgarisée. Elle cherche à expliquer une « jurisprudence » en matière de grâce pour les peines capitales, alors que les décisions présidentielles donnent rarement lieu à des commentaires de la doctrine. Enfin, elle constitue l’une des seules sources disponibles en ce qui concerne les règles en usage au sein des prisons : peu de textes traitent du couloir de la mort en France, et les réglementations propres à chaque prison sont mal conservées dans les archives.