2019
Nicolas Correard, « De la satire lucianesque à la diatribe philosophique : le Charon de Giovanni Pontano (1467) », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.qzj283
Quoi qu'il en soit de la réalité ou non de l'existence de la diatribe en tant que genre dans l'Antiquité, le lien entre le dialogue et ce qu'on peut appeler la tonalité et la finalité diatribiques (au sens d'exhortation parénétique à la philosophie), qui caractérise certains textes de Lucien de Samosate, a intéressé les humanistes de la Renaissance. En témoigne le "Charon" de Giovanni Pontano, humaniste napolitain de premier plan, qui confie ses doutes les plus secrets dans ce dialogue lucianesque situé aux enfers, mais qui y exprime aussi sincèrement un idéal de sagesse, d'inspiration cynico-stoïcienne, opposé à l'irrationalité ordinaire. Par la voix des juges infernaux et par celle de Charon, il polémique avec virulence contre les passions humaines qui agitent les cités italiennes, l'intellectualisme vain de certains collègues et rivaux, ou encore les superstitions religieuses. Mais la satire s'efface pour laisser place à deux nobles âmes aux discours exemplaires, celle du Toscan et de l'Ombrien, que nous comprenons comme des figurations de Leon Battista Alberti, auteur du "Momus", et celle de Pontano lui-même.