Jules Saliège et le courage de parler contre la Shoah. La protestation de cinq évêques contre les rafles de juifs en zone libre (août-septembre 1942)

Résumé Fr

Parler de la protestation de cinq évêques contre les rafles de Juifs en zone libre à la fin de l’été 1942, c’est d’abord souligner le temps du silence. De ce temps du silence quand à l’automne 1940, les églises chrétiennes se taisent à la promulgation du statut des juifs par le gouvernement de Vichy (3 octobre). Un silence partagé par les catholiques, les protestants et les orthodoxes, mais le propos est ici de ne traiter que du cas des catholiques. Pour expliquer cette apathie, il est d’usage de mettre en avant l’anti judaïsme et l’antisémitisme en vigueur au sein du catholicisme de l’époque. Mais pourquoi ce même silence chez les protestants ou les orthodoxes ? L’approche trop souvent univoque de cette question à partir des représentations du « Juif » dans l’Église catholique, que ce soit à l’échelle nationale et internationale, est insuffisante. Il faut nécessairement se plonger dans le contexte historique de cette époque : celui de la défaite militaire de la France. Ce pays vient juste de connaitre le cataclysme le plus dévastateur de son histoire au XXème siècle : la débâcle humiliante de ses élites, un exode de quelques 7 à 8 millions de personnes fuyant vers le sud, des colonnes de réfugiés mitraillées et bombardées par les terribles avions stukas. Nombre de familles disloquées, des dizaines de milliers d’enfants déclarés perdus. Plus d’un million et demi d’hommes, dont beaucoup de jeunes, désormais prisonniers de guerre. [Premier paragraphe]