2016
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[VertigO] La revue électronique en sciences de l’environnement ; vol. 16 no. 1 (2016)
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Sylvie Pouteau, « Des modalités d’intervention « art-science-philosophique » pour éprouver les temporalités de l’urgence environnementale », [VertigO] La revue électronique en sciences de l’environnement, ID : 10670/1.ro0dfk
L’objectif est ici de montrer par une approche philosophique en quoi l’art écologique contribue à requalifier les temporalités environnementales. L’argument de base est qu’on ne peut séparer le fondement philosophique des problèmes de ce qui fait la véritable nature du temps, la « Durée » définie par Bergson comme une pure intensité à l’origine de toutes les différences de nature. L’urgence environnementale rend possible une critique du temps conçu comme dimension spatiale, un temps qui est intrinsèquement non durable. En favorisant une nouvelle proximité entre l’art et la science, les pratiques d’art écologique créent une mise en tension sensible de cette critique sous forme d’hétérochronies – des temps « autres ». L’analyse d’un ensemble d’exemples conduit à identifier trois registres d’expression esthétique : i) esthétique de l’éphémère, du cyclique et de l’archaïque ; ii) esthétique de l’inachevé, de l’évolutif et de l’enchevêtré ; iii) esthétique de l’immobile, du dématérialisé et du futur à venir. Les énoncés reliés à ces différents registres esthétiques sont inventoriés dans un cas d’école, l’exposition-laboratoire « Le vivant et son énergie » mise en oeuvre à l’Inra de Versailles en 2013. Cette expérimentation montre l’intérêt de créer de nouvelles situations de recherche par rapprochement de l’induction artistique, de la réflexion scientifique et d’une philosophie engagée dans l’action. L’enjeu de telles pratiques est d’évaluer les mutations du rapport au temps en train de s’opérer, leur expression dans une nouvelle esthétique de la Durée, et leur capacité à soutenir une éthique du soin par des rapports d’intensité.