Trouver l’altérité dans les traces : les enjeux éthiques de la mémoire de Perceval

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2022

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Ambre Bonte, « Trouver l’altérité dans les traces : les enjeux éthiques de la mémoire de Perceval », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.ror2s0


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Le romancier du Conte du Graal dispose de nombreuses traces sur le chemin de Perceval : terres gastées qui sont la mémoire d’un fléau ; fragiles empreintes des sabots de ceux qui fuient le château du roi Pêcheur et que le chevalier ne rencontrera jamais plus ; gouttes de sang d’une oie blessée dont la couleur convoque l’oubliée Blanchefleur... Ces traces matérialisent une violence faite à une communauté ou à un individu ; elles sont une prière fragile et ténue, un appel à être écoutées et entendues. Devant elle, le moi est invité à se décentrer, le temps d’un regard ou d’une pensée, pour rendre présent ce qui a été perdu, pour prendre conscience de ce qui a été douloureux : la trace contient une potentialité éthique, car « si l’on veut se laisser conduire par la trace, il faut être capable de ce dessaisissement, de cette abnégation, qui font que le souci de soi-même s’efface devant la trace de l’autre1 », il faut se rendre disponible à l’altérité. Mais quel chevalier moins que Perceval aurait-il le temps de demourer, d’interrompre sa chevauchée pour considérer ce qui l’entoure ? Le Gallois incarne la chevalerie la plus naïve, celle qui s’aveugle de l’éclat d’une armure et se précipite, inconsidérément ambitieuse, vers le désir peu circonscrit de se distinguer. Perceval est l’un des chevaliers les plus pressés qui soient, et non pas pour retrouver Guenièvre comme le fait Lancelot, mais pour lui-même, pour la gloire de l’armure : il ne connaît pas, jusqu’à sa rencontre avec un ermite, l’introspection et la connaissance de soi qu’elle amène ; il méconnait aussi les autres et la responsabilité qu’ils exigent de sa part : si sont jetées sur sa route autant de traces qui appellent à faire mémoire, c’est pour donner au chevalier la possibilité de sortir de soi ; c’est aussi et surtout, pour le romancier une manière de matérialiser une exigence éthique, la nécessité de les déchiffrer pour sauver de l’oubli l’être dont elle est la métonymie, ou d’amener à sa rencontre. Analyser le comportement de Perceval face à ces lieux de mémoire permet de cerner dans quelle mesure sa subjectivité se construit ou se fragilise dans ce singulier rapport médiat à autrui ; et en cela, d’appréhender les prémices d’un souci éthique de Chrétien de Troyes.

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