2023
Cairn
Éric Heyer et al., « Partie II. La croissance manque d’énergie : Perspectives 2022-2023 pour l’économie française », Revue de l'OFCE, ID : 10670/1.s5wz1e
L’économie française encaisse de multiples chocs (hausse des prix de l’énergie, incertitudes et tensions géopolitiques, vagues du variant Omicron et difficultés d’approvisionnement, hausse des taux d’intérêts…) conduisant à une baisse de la croissance malgré les dispositifs budgétaires mis en place. Après avoir crû de 6,8 % en 2021, rattrapant partiellement la chute de 2020 (-7,9 %), le PIB n’augmenterait que de 2,6 % en 2022 et de 0,6 % en 2023. Cette prévision n’intègre pas d’effet lié à des ruptures ou un rationnement d’énergie. Le seul « choc énergie », comparable au premier choc pétrolier pour l’économie française, réduirait le PIB de 3,3 points mais les mesures budgétaires pour répondre à la crise énergétique amortiraient le choc à hauteur de 1,5 point en 2023, pour un coût budgétaire brut de 47 milliards d’euros (18 milliards en net).Avec un baril de pétrole à 100 dollars en 2023 et une revalorisation de 15 % des tarifs réglementés du gaz et de l’électricité, les prix de l’énergie augmenteraient de 22 % en 2022 et de près de 10 % en 2023. Le salaire mensuel de base (SMB) connaîtrait une hausse nominale de 3,4 % en 2022 et 3,8 % en 2023. Au total, l’inflation mesurée par l’IPC augmenterait, en moyenne, de 5,1 % en 2022 et de 4,6 % en 2023.Le revenu des ménages va fortement s’accroître au second semestre 2022 en raison des fortes revalorisations de l’été, compensant en grande partie les fortes pertes de revenu du premier semestre. En 2023, l’ajustement attendu sur le marché du travail va peser sur la dynamique de la masse salariale et le RDB réel baisserait de -0,3 % en 2023. Sur deux ans, malgré les mesures budgétaires et la revalorisation du SMIC, le pouvoir d’achat par unité de consommation se contracterait de 1,4 %, ce qui le ramènerait à un niveau proche de 2019. Le taux d’épargne passerait de 15,5 % actuellement à 17,4 % fin 2022 en raison de l’inertie de la consommation et de l’incertitude qui restera élevée en fin d’année. En 2023, le taux d’épargne se réduirait pour revenir en fin d’année à un niveau proche de son niveau d’avant-crise. La « sur-épargne » accumulée depuis 2020 atteindrait 11,7 % du RDB fin 2023.Après près de 240 000 emplois créés en 2022, la faible croissance en 2023 et l’ajustement progressif du sureffectif, évalué à plus de 500 000 emplois à la mi-2022, se traduiraient par des destructions d’emplois (-175 000). Dans ce contexte, après avoir atteint un point bas à 7,2 % au troisième trimestre 2022, le taux de chômage remonterait à 8 % en fin d’année 2023. Ce scénario suppose une relative stabilité du stock d’apprentis au cours des prochains trimestres, autour de 900 000.Sur l’ensemble de la période 2020-2023, les mesures exceptionnelles prises par le gouvernement pour faire face à la crise Covid puis à celle de l’énergie représenteraient un coût exceptionnel pour les finances publiques de 270 milliards d’euros, soit 10,8 % du PIB sur quatre ans.Après un déficit public à 8,9 points de PIB en 2020 et 6,4 points en 2021, celui-ci continuerait de baisser malgré les nouvelles mesures prises sur l’énergie, pour s’établir à 4,9 points de PIB en raison de l’extinction progressive des mesures d’urgence liées à la crise Covid et du fort rendement fiscal des prélèvements obligatoires. En 2023, le déficit public s’élèverait à 5,2 % du PIB, conséquence du ralentissement de la croissance et du moindre dynamisme attendu des recettes fiscales, de la hausse des charges d’intérêts et de la baisse structurelle des prélèvements obligatoires.Après une faible diminution en 2022 à 111,2 % du PIB (contre 112,5 % en 2021), la dette publique, au sens de Maastricht, ré-augmenterait en 2023 pour s’établir à 112,2 % du PIB.