« Compter comme les gens comptent ». La vie de calcul des ouvrières de la bonneterie auboise pendant les Trente Glorieuses

Résumé Fr En

À partir d’archives personnelles d’anciennes ouvrières de la bonneterie auboise, et d’entretiens répétés, l’article vise à éclairer les calculs économiques quotidiens effectués tant sur le lieu de travail, lieu de recettes liés à la production industrielle et à des transactions informelles, qu’en dehors du travail, à travers des activités rémunératrices en argent ou en nature et à travers un contrôle précis des dépenses. La gestion du budget est omniprésente et se manifeste par une comptabilité qui peut être écrite sur des livres de compte ou effectuée à travers des actes témoignant de la capacité à maîtriser et organiser recettes et dépenses. La lecture des documents individuels de comptes à la lueur des descriptions des actions et des évaluations quotidiennes des agents permet de restituer les logiques économiques singulières qui orientent les vies ouvrières, et de souligner le rôle central des femmes dans le déploiement de ces logiques.

From the personal archives of former hosiery workers in the Aube district, along with successive interviews, the article aims at shedding a new light on the daily economical calculations operated on the work location (place of gains, bound to industrial productivity and more informal transactions), as much as outside the employment context, through money-making activities, or in nature, via a strict controlling of expenses. The handling of a budget is omnipresent, and manifests itself in a book-keeping, or through acts that give evidence of a tight capacity of handling and organize both gains and expenses.Reading individual book-keepings through the description of actions, and the daily evaluations by agents, allows the rendition of the specific economical logics which will shape the workers’ lives, and underline the main role of women concerning the displaying of these logics.