2014
Cairn
Anne-Marie Le Pourhiet, « Le droit constitutionnel de la reconnaissance », Civitas Europa, ID : 10670/1.siee3n
Dans son article intitulé : « Reconnaissance - Exhibé et approuvé » publié pour les vingt ans de la revue Le Débat36, l’essayiste Philippe Muray constatait une pathologie contemporaine de l’hyper-reconnaissance qui « sous le nom démocratique de fierté, étend partout son despotisme » et qu’il décrivait comme « un exhibitionnisme de tous les instants, un culte sans précédent de l’ego et une explosion encore jamais vue de narcissisme primaire ». Il ajoutait que « l’on reconnaît d’abord le reconnu à ses droits, multiples, spéciaux et tatillons, et surtout à la manière frénétiquement répressive qu’il a de les faire appliquer ». C’est effectivement ce qui ressort de l’évolution assez « orwellienne » du droit contemporain, interne comme international.Le droit international dit « de la reconnaissance » prétend consacrer un principe objectif de diversité culturelle accompagné de l’octroi aux individus de droits subjectifs culturels mais aussi de l’attribution de droits collectifs aux « groupes les plus vulnérables », c’est-à-dire aux minorités et peuples autochtones, auxquels il faut ajouter les droits des femmes ainsi que la réparation des préjudices historiques.La question se pose de savoir si un tel droit se déploie aussi en droit constitutionnel. Pour le cas français la réponse fût longtemps strictement négative, en raison de la philosophie révolutionnaire et de la tradition républicaine inscrites dans la Constitution. Toutefois certaines révisions constitutionnelles complétées par une jurisprudence moins ferme ont fini par introduire dans le texte fondamental français quelques éléments issus de l’idéologie multiculturaliste et féministe qui se déploie cependant davantage dans des normes infra-constitutionnelles.