2015
Cairn
Ilan Greilsammer, « Israël : le rôle du facteur religieux juif dans le conflit israélo-arabe », Les Champs de Mars, ID : 10670/1.sq5gkd
Avant la création de l’État en 1948, la tradition religieuse juive, telle qu’interprétée par les Sages, était profondément pacifiste et prônait la modération, la médiation et le compromis. La paix, « chalom », est omniprésente dans les textes juifs traditionnels et s’applique à l’ensemble du genre humain, même s’il ne s’agit pas d’un angélisme inconditionnel : le judaïsme fait place à l’autodéfense et à la guerre juste.Aux racines du conflit israélo-arabe, le facteur proprement « religieux » a joué un rôle négligeable. L’origine du conflit est le désir politique d’une partie des Juifs de la diaspora de revenir sur la terre d’Israël pour y établir un Etat juif souverain. Au XIXe siècle, la grande majorité des « Sages de la Thora » en Europe se sont très vivement opposés à l’idéologie et au mouvement sionistes. Le sionisme leur paraissait totalement hérétique, car il forçait en quelque sorte la main de Dieu en suscitant un mouvement de rédemption pour mettre fin au châtiment de l’Exil.Mais une autre partie des rabbins a considéré que la renaissance politique d’Israël s’inscrivait dans le processus messianique annoncé par les textes sacrés. Ils sont à l’origine du mouvement dit « sioniste-religieux » qui a très activement participé à la création de l’Etat et de son armée.Après la conquête en 1967 des territoires de la promesse biblique (Jérusalem, Cisjordanie), à l’exception de quelques individualités et quelques groupes qui font preuve de modération, la grande majorité des rabbins et des personnalités religieuses orthodoxes en Israël ne sont pas prêts à sacrifier ces territoires bibliques sur l’autel du processus de paix. Aujourd’hui, l’évolution générale du public religieux, qui suit ou parfois précède ses leaders, est au durcissement nationaliste et à la recherche de la victoire militaire sur l’adversaire plutôt qu’à la conciliation.