22 février 2018
Gaïa Bonnet et al., « Les agriculteurs face aux risques induits par les pesticides : pratiques culturales, attachements familiaux et territoriaux chez les viticulteurs de l'Hérault », HAL-SHS : sociologie, ID : 10670/1.t2vkdd
Cette communication est issue d'un travail d'enquête ethnographique original mené en 2016 et 2017 auprès des viticulteurs de l'Hérault, lequel s'insère dans une étude plus large et multi-site conduite dans le cadre du projet TRAJECTOIRES (direction Carole Barthélémy, LPED AMU - soutien ENCOPHYTO 2016-2018). Notre objectif ici est de s'appuyer sur un matériau empirique riche (entretiens semi-directifs) pour pointer les liens qui peuvent exister entre perceptions des risques (et pratiques culturales. Nous comparons plusieurs profils de viticulteurs, nous appuyant sur leurs récits présentant l'histoire de leurs exploitations, pour comprendre les choix de traitement réalisés sur plusieurs générations en fonction d'un contexte socioéconomique, mais aussi législatif et environnement variable. Nous insistons notamment sur les motivations au changement, quand cela se produit au moment de la reprise d'une exploitation familiale ou d'une installation. L'idée n'est cependant pas d'en rester à des décisions individuelles, mais bien de s'intéresser au poids des structures familiales, professionnelles ainsi qu'aux filières qui expliquent les tensions durables entre les mondes agricoles et nos sociétés de préoccupées par les questions environnementales (Roussary et al. 2013 ; Compagnone 2014). Nous montrons ainsi que, selon le profil technico-commercial, une hiérarchisation des risques différenciée s'opère au profit d'une gestion prédictive du risque climatique, plus que des risques environnementaux et sanitaires. Toutefois, d'autres variables beaucoup plus transversales jouent aussi. Les formes d'attachement au territoire (méditerranéen - sec mais connu pour ses épisodes climatiques parfois extrêmes) et à l'exploitation (la viticulture languedocienne ayant une histoire très particulière, marquée par de fortes luttes sociales, cf. Martin 1998), le rapport à la nature, le poids des préoccupations liées à la santé, sont autant de dimensions qui participent à la fabrication des risques environnementaux et sanitaires, en fonction de jeux d'acteurs à plusieurs niveaux (Jensen, Mette 2008 ; Gilbert 2003). Nous nous proposons d'expliciter les différentes dimensions qui participent à la prise de décision en matière de traitement et déterminent le choix d'un modèle cultural (Nicourt, Girault 2013). Quel rôle joue en la matière le conseil agronomique, les organisations et les relations professionnelles ? Quelles sont les contraintes structurelles évoquées dans la filière viticole ? Qu'est-ce qui, au contraire, motive certains viticulteurs à changer malgré tout pour des pratiques plus respectueuses de l'environnement et de leur santé ? Quels éléments biographiques ou considérations plus personnelles, sur le métier et au-delà, le justifient ? Quelles organisations (ou réseaux d'acteurs) le favorisent ? Et dans ce cas, comment se gèrent les autres risques ? Pour quel affichage et reconnaissance sociale ? Cette communication contribue à l'identification des freins et leviers à l'intégration de pratiques plus respectueuses de l'environnement.