2020
Cairn
Bertrand Mazabraud, « Le scandale de la peine », Transversalités, ID : 10670/1.t9fnz2
La peine, qui dans son principe répond à une accusation, fut elle-même dénoncée et accusée. Son scandale tiendrait à ses modalités pratiques : inutiles, nuisibles, voire barbares, ou à la faiblesse de son fondement rationnel. Pourtant, à suivre les analyses de Hegel, il apparaît que la peine n’est pas sans raison. Si scandale de la peine il y a, il tient, d’abord, à la faillibilité des décisions humaines qui statuent pour autrui, ensuite, en régime démocratique, à la jointure instable entre le fondement rationnel de la peine et ses modalités pragmatiques. Toutefois, le scandale de la peine offrait aussi un espace de contestation de celle-ci, de réflexion de la société sur elle-même, voire d’amendement. Or, au nom d’un gain d’efficacité, d’une meilleure égalité des justiciables, et de moins d’erreurs de jugement, la rationalité économique, doublée des dispositifs digitaux, reconfigurent désormais les instances pénales. Dès lors, une pénalité diffuse, adhérant au profil de chacun apparaît. À cette aune, le scandale de la peine n’était-il pas un moindre mal, à préserver ?