Les textiles liturgiques de la Sainte-Chapelle de Dijon : Mémoire ducale ou “démarcation” royale ? (1419-1547)

Résumé En

Cet article résulte d’une communication donnée dans le cadre d’une journée d’étude interrogeant l’appropriation des collégiales de la part des membres de la haute aristocratie laïque. Ce thème nous a encouragé à développer une approche politique et symbolique des donations de textiles liturgiques dans la Sainte-Chapelle de Dijon. La chapelle du palais ducal bourguignon préexistait de longue date à la dénomination de « Sainte-Chapelle ». Si elle passa aux mains du roi de France à partir de 1478, elle continua de s’affirmer comme « Sainte-Chapelle des ducs de Bourgogne » près de dix ans après son rattachement. En cette époque où les tentures et tapisseries servaient d’arrière-plan à toutes les cérémonies curiales, le roi mit-il en place une stratégie spécifique pour marquer son église en matière de paramentique ? À travers les donations, mais aussi une conservation consciencieuse, ce trésor textile révèle l’identité ambiguë de la Sainte-Chapelle dijonnaise, lieu de mémoire des ducs de Bourgogne et nouveau bastion royal. Chargés d’emblèmes, de devises et plus généralement du souvenir du donateur, les vêtements et les parements constituaient les bannières des puissances laïques sur le terrain de l’éphérimérité rituelle. Tantôt « royal », tantôt « ducal », le maître-autel se métamorphosait en effet au grès des célébrations. Les textiles de la Sainte-Chapelle révèlent finalement moins les dissonances et les conflits entre mémoire ducale et démarcation royale que la formidable capacité d’adaptation des chanoines, qui surent se réclamer de l’un ou de l’autre parti en fonction de leurs intérêts.