5 mai 2020
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Nawelle Lechevalier-Bekadar, « Her other Bodies: a Travelogue de Brian Evenson. Rituels d’une écriture au scalpel. », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.thz54a
Dans sa nouvelle intitulée « Her Other Bodies: a Travelogue » issue du recueil Altmann’s Tongue (1994), Brian Evenson propose d’appréhender le geste d’écriture comme acte de cruauté. Dans un mouvement qui rappelle « La Colonie pénitentiaire » de Kafka, le texte met en scène les rituels d’un meurtrier qui grave des étoiles sur le corps des femmes qu’il rencontre et tue au gré de ses pérégrinations dans le Sud Ouest américain. De façon très frappante, l’instrument utilisé est un canif (« a pen-knife »), soit un outil qui, dans la langue anglaise, offre un lieu de rencontre particulier entre écriture et cruauté. La nouvelle fantasme une pratique du tatouage qui serait vidée de toutes ses propriétés initiatiques pour devenir le parangon de l’objectification morbide d’autrui. Loin de permettre au sujet de s’approprier son histoire en la faisant affleurer sur son corps, la nouvelle imagine le tatouage comme un acte de (dé)possession ultime rappelant la chair à sa matérialité pure. Ce faisant, Evenson consacre un nouveau rapport de l’écriture au corps qui, dans sa violence, fait signe vers les pouvoirs terrifiants du langage.