Les veilleurs de fantômes

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2023

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Soko Phay, « Les veilleurs de fantômes », HAL-SHS : histoire de l'art, ID : 10670/1.tlo6k8


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Les veilleurs de fantômes « Depuis l'enfance, je m'interroge sur le parcours de ma mère, d'où elle vient. Comme un besoin impérieux de savoir ce qu'elle cache. J'ai toujours écrit dessus, dans les rédactions au collège comme plus tard dans mes projets de films » 1 , déclare le réalisateur Guillaume Suon. Ce dernier fait partie de la génération postréfugiée, étant né dans le pays où sa mère a trouvé l'asile politique. Comme cette femme, 50 000 Cambodgiens 2 sont arrivés en France durant les années 1970 et 1980, fuyant la guerre civile, puis le régime génocidaire des Khmers rouges. Beaucoup d'entre eux ont transité de longs mois par des camps de réfugiés qui sont des « non-lieux » 3 , des no man's land, à la frontière thaïlandaise. Les réfugiés vivent avec le sentiment d'être constamment déplacés et ne sentent nulle part chez eux, ne bénéficiant ni d'une protection politique, ni d'un confort psychologique. Ils portent en eux la « désolation d'être sans pays, sans endroit où retourner, de n'être protégé par aucune autorité nationale, aucune institution, de ne plus être capable de décrypter ni le passé, si ce n'est comme un regret amère et impuissant, ni le présent » 4 pour reprendre Edward Saïd dans son oeuvre autobiographique Out of place. Les réfugiés sont des sujets doubles. Pris entre deux rivages, entre l'ancien qu'ils ont quitté et le nouveau qu'ils abordent, ils ne peuvent s'identifier pleinement à leurs anciennes traditions ni adopter ceux du lieu d'arrivée. Le paradoxe de leur condition d'exilé est cette tension entre le désir d'intégration et la peur de trahir la culture d'origine. Inadaptés au monde environnant, ces réfugiés cherchent repère et réconfort, notamment en chargeant leurs enfants de réussir à l'école, de porter leurs ambitions sociales. A l'inverse, ces derniers vouent à leur égard un sentiment ambivalent. D'un côté, ils admirent en eux le courage dont ils font preuve face à l'adversité, mais également leur esprit d'abnégation et de sacrifice pour la famille. De l'autre, ils ressentent de la gêne, reprochant à leurs parents d'assimiler ni la langue ni les codes socio-culturels de leur pays de résidence. L'ambivalence et le ressentiment parfois sont renforcés par le mutisme de leurs aînés. Ils se heurtent les uns et les autres à un mur d'incompréhension.

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